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Analyste:
Denis Morrier Le Hilliard Ensemble effectuera cette année sa dernière tournée, en compagnie du saxophoniste Jan Garbarek (en souvenir de leur « Officium » qui grimpait, il y a vingt ans, en tête des hit-parades). Qu’allaient-ils enregistrer au terme de cette carrière de quatre décennies, au cours de laquelle le contre-ténor David James n’a jamais quitté son poste? Ils rapprochent leurs terrains d’activité: des madrigaux anciens, et des pièces contemporaines, avec pour passerelle des vers fameux du Canzoniere de Pétrarque et de L’Enfer de Dante (la lamentation du comte Ugolino et ce Cor tristo qui donne son titre au récital). La confrontation
n’apparaît ni évidente ni vraiment convaincante. Les madrigaux « archaïsants
» de Pisano (1490-1548) et d’Arcadelt (1507-1568) incarnent une forme de «
classicisme » de la première Renaissance, mêlant équilibre et pureté du
contrepoint, plaçant l’énonciation du texte au-devant des préoccupations
musicales. Les triptyque de l’Anglais Roger Marsh (né en 1949) ne compte pas
parmi les créations les plus fascinantes de ces dernières années : leur
langage harmonique et leur conception formelle des plus « orthodoxes »
(privilégiant consonance, parallélisme des voix et déclamation
homorythmique, avec simplement quelques glissandos et autres effets de
parlando désormais académiques, sont peu de chose en regard des aventures «
madrigalesques » de Crumb, Eötvös, Fénelon ou encore d’Adamo.
L’interprétation du quatuor vocal est quant à elle conforme à son esthétique
habituelle, qui n’a pas évolué depuis des lustres, quel que soit le
répertoire, ancien ou moderne : un a cappella linéaire et monochrome (timbre
exagérément prégnant du contre-ténor David James), confiné dans une
dynamique retenue, (ab)usant des silences et réverbérations dans une
acoustique porteuse. Une signature sonore. Bref, un programme sans vraie
cohérence ni révélation, formant un estimable objet d’artisanat musical
sagement réalisé. |
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