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Analyste: Laurent
Barthel
Quittant Deutsche Grammophon ‑
elle y avait notamment proposé un récital Bach d'un intérêt inégal, mais que
nous avions trouvé prometteur…, Nathalie Stutzmann continue chez Erato son
petit tour discographique de la musique baroque. Il s'agit, cette fois, d'un
album Haendel, gravé en studio, en mai 2014, où elle assure à nouveau,
simultanément la partie vocale et la direction de son petit ensemble Orfeo
55. Comme pour la plupart des récitals haendéliens récents, le choix des
pièces s'inscrit dans une thématique particulière, mais qui n'est, cette
fois, ni dramatique, ni psychologique. Le titre, Heroes from the Shadows
(Héros de l'ombre), renvoie simplement à ces personnages de second ou
troisième plan dont fourmillent les opéras du compositeur, et dont on écoute
distraitement les airs (souvent stéréotypés, à vrai dire), en attendant
qu'il se passe des choses plus consistantes, au risque de négliger quelques
perles. Ces instants particuliers, Nathalie Stutzmann a tenté d'en réunir un
aperçu ; et l'on parcourt effectivement avec intérêt ces pages plus cachées,
qui n'étaient pas destinées aux plus célèbres sopranos et castrats du
moment. Comme pour le disque Bach, elle a intercalé une poignée de
sinfonie et de musiques de ballet, avec une véritable inspiration dans
les nuances et l'invention du continuo, même si cette partie du récital peut
paraître moins nécessaire. En bonne forme vocale, malgré un timbre dont elle
ne réussit pas toujours à masquer la légère usure, la contralto française
vient aussi rééquilibrer, à point nommé, l'actualité haendélienne,
monopolisée par les falsettistes. Belle occasion d'apprécier un timbre plus
homogène du haut en bas de la tessiture, avec une technique fondamentalement
plus solide, au risque d'une certaine monotonie que les aléas d'émission des
contre-ténors dissipent plus facilement, en usant intelligemment de leur
apparente fragilité. On peut d'ailleurs directement comparer, puisque
Philippe Jaroussky est invité en plage 14, dans le superbe duo Cornelia/
Sesto de Giulio Cesare. Et puis, dans les vocalises de Nathalie
Stutzmann, signalons une absence de nasalisation bien agréable, qui nous
change de quelques voix féminines très en vue et pourtant caricaturales,
parfois, dans ce type d'exercice de véIocité.
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