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Appréciation d'ensemble / Overall evaluation :
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Analyste: Sophie Roughol
Les carmets de route de Savall Pour poser ce septième jalon de la collection « Raices & Memoria » (Racines et Mémoire), Jordi Savali et sa caravane s’embarquent dans le sillage de François Xavier, fondateur avec Ignace de Loyola de la Compagnie de Jésus, dont on fêtait en 2006 le cinq-centième anniversaire. Et le travail du musicien catalan ressemble bien à un apostolat filial, au-delà du simple objet éditorial, même parfait en tous points. « La Route de l’Orient », c’est avant tout un travail éditorial exemplaire. Un livre épais en 5 langues — environ 45 pages pour chacune — est conçu comme un condensé de tout ce qu’il faut savoir pour comprendre François Xavier, et la démarche qui le conduit à la fin de sa vie aux portes de la Chine. Figure en préambule la déclaration d’intention de Jordi Savall: un travail sur le modèle de celui qui fut réalisé pour Don Quichotte, portrait intime inclus dans le contexte historique, littéraire et musical, remontée des siècles qui rend François Xavier présent au nôtre, tangible, sensible. Suit un très intéressant texte de Rui Vieira Nery,de l’Université d’Evora, sur le travail musicologique. Puis, après une chronologie de la vie du saint, et avec la complicité de Manuel Forcano, se succèdent les textes essentiels à la compréhension du contexte de création de la Compagnie de Jésus : anthologie des textes fondamentaux de l’humanisme (Erasme, Machiavel, More, Luther), de la Contre-Réforme (intégrale des Constitutions de la Compagnie de Jésus, textes du Concile de Trente), enfin itinéraire descriptif du voyage de François Xavier, ponctué d’extraits de ses lettres. Autant de portes ouvertes à des explorations ultérieures, pour qui voudra compléter ce corpus initial. Et la musique ? Deux CD sous forme de voyage sonore, l’un consacré à l’Europe, l’autre à l’arrivée au Japon : chaque plage est une étape, où l’auditeur contemporain semble cheminer aux côtés de François Xavier dans les musiques de son temps. Cent-soixante minutes pour cent mille kilomètres et plus d’un siècle, entre la naissance du saint, et la fermeture du Japon au christianisme : avec les musiciens d’horizons divers, Afrique et Asie, invités à se joindre à Hespèrion XXI et à La Capela Reial, c’est une initiation flamboyante, ponctuée par le fil rouge de l’hymne marial « O Gloriosa Domina ». Partant de Pedro de Escobar, Heinrich Isaac, Christopher Tye, Cristobal de Morales, on glisse subtilement dans un autre monde par le phénomène d’acculturation propre aux Jésuites, accompagnant Montserrat Figueras dans un splendide villancico revisité par Goa, puis suivant les mutations de « O gloriosa Domina » dans un contexte de raga puis de musique traditionnelle japonaise. Magnifique somme à laquelle il faudra revenir plusieurs fois pour en saisir toute la richesse initiatique. En ces temps d’interrogation sur l’avenir du compact, Jordi Savall, qui déjà fut pionnier à l’époque de la fondation d’Alia Vox, n’aurait-il pas trouvé l’une des réponses ? Télécharger le seul volet musical de cette somme n’aurait aucun sens; se priver du travail littéraire et éditorial qui l’accompagne serait vider l’illustration musicale de toute sa cohérence et de sa substance même.
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