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Analyste: Paul de Louit Pour reprendre l'expression de Vincent Genvrin, la discographie de Grigny est « hantée par les plus grands ». Passés ceux-ci (les Chapuis, Isoir, Alain, Boyer), on s'est moins pressé d'enregistrer l'œuvre de ce météore dont le Premier (et seul) Livre d'orgue a une ampleur unique dans l'orgue français baroque. C'est donc un événement que cette nouvelle intégrale partagée entre deux de nos plus grands organistes sur l'instrument de la Chapelle royale de Versailles dont ils sont titulaires par quartiers, reconstitution d'un Clicquot de 1711.
Dans la Messe , Michel Bouvard exalte « la profondeur du sentiment, l'inspiration noble » (Dufourcq) de l'art de Grigny : tempos médians, textualité littérale, intensité sans relâche. Basse de trompette ou Grand jeu, les anches sont moins touchées « hardiment » ou avec « grand feu » - consignes du temps - qu'elles ne se parent d'un lyrisme concentré dont même la vivacité (fort tempérée) des duos s'imprègne. Non sans austérité, la densité expressive de l'écriture s'incarne dans des fugues et un Récit de tierce en taille d'une hauteur et d'une intériorité saisissantes.
Le toucher de François Espinasse libère davantage les cinq Hymnes, entre la gravité des pleins-jeux et des fugues, l'élégance des récits et des duos, la tendresse d'un trio ou le brio des dialogues. La signature des deux amis n'en reste pas moins une pudeur quasi janséniste, très éloignée de la flamboyance qu'y ose un Olivier Houette (Triton, cf. 682). Chez celui-ci s'exprime un virtuose de vingt-sept ans ; « poète dont l'imagination s'épanche au contact des mystères de la religion » (Dufourcq), le Grigny plus méditatif de Michel Bouvard et de François Espinasse apparaît comme filtré par Bach, le plus illustre de ses copistes.
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