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Diapason # 740 (01/2025)

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Château de Versailles CVS145 

Code barres / Barcode :
3760385430447


 

Analyste: Denis Morrier


 

Le titre interroge, mais le propos est astucieux ! Ce Vespro inédit n'est pas la reconstitution d'un office historique perdu de 1643, à la manière des vêpres « de saint Jean Baptiste » de Gustav Leonhardt (Philips, 1988) ou « de la Salute » par l'ensemble Akadêmia (Verany, 1996). Le « della Madonna » qui figure à côté du titre ne correspond pas non plus à une liturgie mariale précise : on retrouve bien les cinq psaumes, l'hymne et le Magnificat nécessaires à ce rite, mais pas les antiennes grégoriennes qui seules permettraient de les inscrire dans une fête particulière.

 

Vincent Dumestre a simplement puisé dans les ultimes publications sacrées de Monteverdi : la monumentale Selva morale espirituale de 1640 et le recueil posthume de 1650 (Messa a quattro voci e salmi). Et il a agencé les pièces en suivant le déroulement du Vespro della Beata Vergine de 1610. Conformément à son modèle, il insère après les psaumes des concerti sacri (censés se substituer à la reprise des antiennes).

 

Inspiration et libertés

Tandis que Monteverdi s'en tenait aux textes liturgiques, le chef introduit également des œuvres spirituelles non destinées à l'office. Il glisse ainsi le contrafactum d'un madrigal du Quinto Libro (Stabat Virgo Maria) et le Pianto della Madonna, contrafactum du célèbre Lamento d'Arianna (porté avec délicatesse et éloquence par Eva Zaïcik).

 

Autre liberté : le Salve regina secondo (où les deux voix féminines s'adonnent à de délicieux entrelacs) se retrouve au cœur du programme, alors que ce chant est destiné aux complies ou à la conclusion des vêpres quand elles sont le dernier office du jour.

 

Enfin, Monteverdi n'ayant pas produit de Deus in adjutorium ni d'Ave maris stella après 1610, Dumestre en propose ici des « recompositions ». Pour le premier, il emprunte le matériau du madrigal Altri canti d'Amor, avec un résultat peut-être discutable quant au style mais indéniablement brillant. Pour le second, il contrepointe librement le cantus firmus avec de réjouissantes ornementations.

 

Tout au long de ce passionnant programme, les six voix solistes rivalisent de brio tandis que les chœurs et les instruments du Poème Harmonique déploient, sous les voûtes de la Chapelle royale de Versailles, des fastes sonores que ne renierait pas la mythique Cappella di San Marco vénitienne.

 

Ce Vespro della Madonna subjugue par les rutilances de son Dixit secondo, mais aussi par ces volutes joyeusement partagées entre les trois duos de solistes dans l'enivrant Laetatus sum - un sommet de virtuosité. Et comment ne pas succomber aux contrastes saisissants, entre ténèbres abyssales et lumières célestes, que dessine le Nisi Dominus ? ou encore à ces subtiles coloratures dans le Magnificat ? Vincent Dumestre et ses troupes signent-là un splendide et enthousiasmant hommage à l'ultima maniera du génial Oracolo della musica.

 


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