Texte paru dans: / Appeared in: Pour s'abonner / Subscription information
|
|
 |
|
|
Analyste:
Frédéric Degroote Lucile Boulanger et Juliette Guignard n'ont pas pour seul point commun d'avoir commencé l'instrument à l'âge de cinq ans. Désireuses de montrer que la viole de gambe n'est pas qu'une affaire de baroqueux, toutes deux invitent, à côté des maîtres ayant donné ses lettres de noblesse à l'instrument (Sainte-Colombe et Demachy sont à la croisée de leurs programmes), des compositeurs des et XXIe siècles. Boulanger opte pour un portrait strictement français quand Guignard pioche chez Young et Bach. La première s'en tient aux œuvres écrites pour la viole, toutes périodes confondues, quand la seconde s'attaque, avec des fortunes diverses, à des pièces pour piano préparé de Cage ou à la Sonate pour violon et clavecin BWV 1023 de Bach.
Boulanger tisse sa toile d'un geste ample dès les pièces de Sainte-Colombe (la Sarabande de la Suite en ré mineur !) et confirme sa puissance évocatrice chez Nicolas Hotman (superbe Ballet de la Suite en ré mineur), trop rare au disque malgré son statut de père de la lignée de violistes français. Intercaler des miniatures très accessibles de Philippe Hersant ( L'Ombre d'un doute ) écrites en échos à L'Orfeo de Monteverdi se révèle une très bonne idée. La véritable découverte vient avec La Dame d'onze heures de Claire-Mélanie Sinnhuber (née en 1973), où la gambiste nous captive par la poésie qu'elle infuse à cette danse explorant les possibilités expressives de l'instrument (harmoniques arpégés, pizzicatos).
Guignard tranche d'emblée avec un archet plus incisif et percussif, comme en témoigne Tossed as it is untroubled de Cage. Articulé en diptyques, le programme rapproche ainsi pour le meilleur un prélude d'Abel et A Room de Cage. La danse s'invite avec Sendung celte de François Rossé (né en 1945), qui fait se rencontrer Occident et Orient. Le rendu général du projet, plus âpre, sera affaire de goût.
Quoi qu'il en soit, voilà deux albums complémentaires qui ont pour mérite de présenter la viole de gambe sous un autre visage. |
|
