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Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste:
Jean‑Luc Macia Ecrites entre 1719 et 1722, ces « Contemplations spirituelles sur les amères souffrances et la mort de Jésus‑Christ » témoignent de l'art expérimental de Telemann fraîchement arrivé à Hambourg. Manifestement, le compositeur voulait éviter toute théâtralité, et s'éloignait donc du modèle fixé tout récemment, à Hambourg aussi, par le texte de Brockes (qu'il mit en musique lui‑même). Ni turbae, ni dialogues dramatiques cette fois. Telemann convie les auditeurs à participer à des méditations aboutissant, comme l'écrit Gilles Cantagrel dans la notice, à un face‑à‑face dévotionnel entre le chrétien et le Christ. Le climat de l'ouvrage n'en est pas pour autant confit ou compassionnel. Telemann use de tout l'arsenal de la musique vocale, sacrée ou lyrique, de l'époque. Il n'hésite pas à adopter le style galant le plus séduisant, comme dans le premier air de la Dévotion avec sa flûte enrubannée qui peut tourner à l'air d'opéra: les « nein » proférés par le chanteur dans la même aria ou encore l'air ravageur de Pierre qui ne craint ni les tortures ni les flammes de poix. Et que dire des volutes virtuoses d'un violon vivaldien dans un des airs de la Dévotion (CD 1, plage 19) ? On est aussi surpris ‑ par le « Gute Nacht » que lance Jésus à ses disciples dans sa première intervention, page d'une sérénité confondante quand on sait que le Sauveur n'ignore rien de ce qui l'attend. Et pour qui connaît bien son Bach, quelle émotion d'entendre le Christ chanter lui‑même tout près de la fin « Es ist vollbracht! » dans une affirmation lancinante. Des chalumeaux, des cors et des hautbois colorent de manière habile et très artistique plusieurs passages de la partition, avec ce savoir‑faire qui caractérise l'écriture de Telemann. Ce chef‑d'oeuvre miroitant, d'une intense profondeur spirituelle méritait de nous être révélé et dans d'excellentes conditions. Gottfried von der Glotz sait jouer de ce kaléidoscope d'affects, à la tête de Freiburger dans une forme qu'on ne leur a pas toujours connue ces derniers temps. Malgré un timbre légèrement usé, Peter Harvey habite avec une force expressive peu banale le rôle de Jésus, à qui il prête une conviction pleine de superbe (son combat contre Satan dans « Ich will kämpffen ») et une réserve nourrie d'une foi irrécusable en son Père. Colin Balzer enchaîne les airs très variés de la Dévotion avec un timbre moelleux et mobile tandis qu’Anna Lucia Richter le relaie avec moins d'aisance technique mais un timbre solaire et des phrasés conquérants. Un grand Telemann. |
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