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Analyste: Gaëtan Naulleau Pierre Hantaï, interrogé par Jean‑Luc Macia pour le 80e anniversaire de Gustav Leonhardt, évoquait le choc que fut la découverte des Suites anglaises publiées chez Seon au milieu des années 1970 (cf. no 559). Premier contact du jeune homme avec un musicien qui allait changer sa vie, avec lequel il a étudié, dont il connaît tous les tours de mains pour faire sonner un clavecin sans sécheresse ni systématisme, qu'il vénère. Son premier enregistrement après la disparition de Leonhardt ne se présente pas comme un hommage, mais la révérence ne fait aucun doute. On la voit dans le choix des Suites anglaises, dans l'insertion de trois préludes de choral ornés (miniatures dont Leonhardt aimait parsemer ses récitals), dans l'instrument, copie de Mietke réalisée par Dowd pour Leonhardt et reconstruite par Kennedy. L’héritage est moins une affaire de style que de toucher, une volonté obstinée d'explorer tout le potentiel du clavier ‑ et ce dans chaque pièce. La ligne de la Sarabande en la mineur n'a pas moins de relief qu'un mouvement lent de Rachmaninov sous les mains d'Horowitz. Elle est donc aux antipodes de l'éloquence plus homogène et sensuelle de Christophe Rousset dans un disque grandiose (Ambroisie, Diapason d'or). L’opposition est frappante dans le Prélude en la, trépidant et jouissif chez Rousset, plus mesuré chez Hantaï (et Leonhardt) mais d'une énergie colossale, minutieusement dosée entre d'infimes ruptures nerveuses et des vagues de tendresse soudaine. La combinaison du rubato capricieux, de l'articulation courte et de l'ornementation tape un peu sur le système dans la Courante en la mais trouve son point d'équilibre dans celle en ré, dont les appuis feraient bondir un danseur jusqu'au ciel Le prélude‑fleuve en ré devient une grande aventure sonore ‑ on ne décroche pas une seconde, une gageure. La sarabande déclame avec un pathos noir que Leonhardt osait déjà, la gigue tricote ses triolets et ses trilles avec une fureur rentrée, refusant l'élan vif qui offre chez Rousset un exutoire aux tensions diaboliques. Les chorals ornés sautent aux oreilles. Micros placés différemment et niveau de gravure plus élevé, il faudra rectifier sur votre amplificateur. Le Concerto italien glisse un intermède ensoleillé dans un disque exigeant et fascinant, qui vous prend au collet sans vous
demander si vous voulez le suivre ou pas. Leonhardt aussi – avec tout le
tact qui était le sien ‑ avait ce culot. |
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