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Diapason # 629 (11/2014)
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Metronome
MET1089




Code-barres / Barcode : 5028165108923

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Appréciation d'ensemble:

Analyste: Gilles Tordjman

Maître de guitare de Louis XIV, Robert de Visée publiait un an après la mort du souverain des Pièces de théorbe et de luth, mises en partition, dessus et basses (1716) à J'enjeu ‑ musical et commercial ‑ transparent: enrayer la pratique déclinante des cordes pincées en offrant l'opportunité d'adapter ces pages à d'autres instruments. A mesure que ses superbes trouvailles mélodiques essaimaient chez ses contemporains (Couperin, Dandrieu ou Campion le citent plus ou moins explicitement), la figure de ce grand homme de cour s'effaçait dans les replis d'une histoire oublieuse. A tel point que sa biographie demeure aujourd'hui obscure, n'étaient les précieuses recherches de Gérard Rebours.

Le disque a servi assez généreusement sa production pour luth, mais avec des bonheurs divers : le plus souvent rafistolée dans des transcriptions pour guitare classique, voire défigurée par un pathos ségovien indifférent à la nécessité de garder à cette musique sa fragile nature de plainte. Car si la musique de Robert de Visée est d'une insondable tristesse, encore faut‑il comprendre que cette tristesse est l'héritière directe de la mélancolie des humanistes de la Renaissance, une passion tout uniment féconde et consolatrice. Hopkinson Smith (Astrée, 1989; à réédi­ter) et Pascal Monteilhet (Virgin, 1992 et Zig‑Zag Territoires, 2005) avaient l'un et l'autre pris la mesure d'une telle charge émotionnelle, quitte à surligner l'obscur et l'instable. Sur un grand théorbe parfait assorti à l'écriture de De Visée, Fred Jacobs propose une tout autre lecture qui, passé la surprise de la première écoute, enthousiasme par sa pertinence: sans rien ignorer des tourments de l'âme baroque, il rend aux mouvements vifs leur verdeur rythmique et brosse le portrait de Robert de Visée en homme de son temps : contemplatif, certes, mélancolique, sûrement; mais aussi acteur et témoin engagé, fin observateur de son entourage. La Monfermeil et La Conversation sont rendues comme des Fragonard. La transcription de la célèbre Chaconne des Harlequins de Lully est peut‑être la plus belle qu'il nous ait été donné d'entendre. La proposition de Fred Jacobs mérite le détour: de quoi patienter jusqu'à la parution du disque consacré à de Visée que Rolf Lislevand a mis en boîte il y a plus de deux ans...

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