Texte paru dans: / Appeared in: |
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Appréciation d'ensemble: |
Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste:
Denis Morrier Quoi ? Encore un Lamento d’Arianna de Monteverdi ? Encore L’Eraclito amoroso de Strozzi ? L’Amarilli mia bella de Caccini ? La seule lecture du programme nous agaçait autant que le résultat nous transporte. Sans doute parce que Roberta Mameli et Luca Pianca proposent un retour aux fondamentaux, à la « substantifique moelle » de ces chefs‑d'oeuvre. Leur interprétation tranche avec les usages les plus récents : ceux‑là même qui nous avaient, pourtant, pleinement convaincus lorsque Magdalena Kozena se confiait dans de sublimes « Lettere amorose » (Archiv, Diapason d'or). Résumons: depuis les réalisations de Montserrat Figueras et Jordi Savall, les interprètes ont souvent privilégié, pour ce répertoire de monodies accompagnées, des groupes de continuo étoffés, aux colorations multiples et d'une grande ampleur dynamique, invitant la voix à une expression théâtrale, et promettant une variété bien utile à l'échelle d'un album entier. Kozena faisait ainsi appel aux huit instrumentistes de Private Musicke, qui ne lésinaient pas sur les effets. À l'inverse, Mameli et Pianca renouent avec l'idéal da camera qui a prévalu à la création de ces miniatures expérimentales. En une suave ascèse, l’écoute est concentrée sur le chant, donc le mot. Seul l'archiluth le soutient, rien ne vient nous distraire du discours poétique. Et quel luth! Luca Pianca tient un rôle bien plus éminent que celui de simple accompagnateur: son toucher caméléon répond à la diversité fantastique, et toujours précise, de ses réalisations de la basse continue. Il prolonge ou prépare chaque mot, chaque intention expressive de la voix. Et le timbre adamantin de Roberta Mameli voit ainsi ses couleurs, qui certes ne sont par les plus riches au monde, intensifiées en symbiose avec le luth. L’oreille est captivée, d'un bout à l'autre de chaque phrase! La soprano adopte un ton inhabituel, de noblesse mêlée de passion: elle distille les vers du Lamento d’Arianna sans aucun débordement, disséquant l'émotion enfouie au coeur du texte, pour retrouver une gravité poignante. Elle sait, pour L »Eraclito amoroso, nourrir des accents contrastés au sein d'une lecture intérieure: moins déchirée que Magdalena Kozena ou Isabelle Poulenard (Adda), elle n’est pas moins poignante. Autres joyaux revisités, l'émouvant Lamenta di Didone de D’India, le rayonnant Ecco di dolci raggi de Monteverdi... Et une surprenante pépite : l'interprétation da camera de l'un des plus fameux monologues da teatro : les adieux de l'impératrice Octavie, extrait de L'incoronazione di Poppea de Monteverdi. L’accompagnement minimaliste invite la chanteuse à des subtilités de nuances et à un pathétisme distancié que la scène ne favorise guère. Le résultat est d'une sidérante intensité tragique. |
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