Texte paru dans: / Appeared in: |
|
Appréciation d'ensemble:
 |
Outil de traduction (Très approximatif) |
|
Analyste:
Xavier Bisaro La première seconde de l'album ? Un concentré de style. Qu'on en juge : attaque tranchante du grand Prélude en mi bémol, ornement nerveux, désinence montée sur ressort annoncent une vision personnelle et enlevée que Maude Graton instaure d'emblée. La prise de son, qui nous installe près de l'instrument de Ponitz, ajoute encore à l'impression de sentir vibrer un contrepoint tout en muscles. Déjà applaudie au clavecin dans ces colonnes (Diapason d'or pour Wilhelm Friedemann Bach), elle signe là son premier récital à l'orgue, dont le programme reflète la grande diversité des inspirations de Bach à Leipzig. La « modernité » de la sonate en trio côtoie la spéculation venue du fond des âges (les variations canoniques sur Von Himmel hoch), de même que les affects les plus extravertis alternent avec l'introspection du choral Vor deinen Thron, dont la légende dorée situe la composition par Bach à quelques heures de sa propre mort. Le souffle imprimé à la moindre pièce est remarquable même s'il s'accorde, par moments, à un certain maniérisme (les rythmes pointés dans le BVW552, un goût prononcé pour les basses en pizzicato). Et l'autorité surjouée étouffe la respiration dans I’Andante de la quatrième sonate en trio et la fugue du BVW548. Mais dans ces moments‑là, Maude Gratton peut s'appuyer sur des qualités qui lui épargnent tout risque de bavardage. Chambriste aguerrie, elle a retenu du dialogue entre divers instruments une étonnante capacité à sculpter la masse polyphonique. Là où l'oreille trop habituée aurait tendance à privilégier le rendu global, Gratton la guide jusque vers les détails oubliés, les reliefs subtils où l'humanité de l'artisan qui les façonna est la plus sensible. Les Variations canoniques illustrent parfaitement cette manière: autour du cantus firmus astucieusement registré au second plan pour les premières variations, les lignes du contrepoint sont animées d'une énergie qui, à elle seule, renouvelle la perception de cette pièce pourtant gravée à de multiples reprises... Rien de gratuit dans ce disque pressant, rarement plaisant et toujours parlant. |
|
