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Diapason # 661 (10/2017)
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Aparté
AP155



Code-barres / Barcode : 3149028114324


 

Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Jean‑Philippe Grosperrin
 

Une statue qui prend vie, une effigie royale qui se dresse soudain : belle idée de mettre en miroir Pygmalion avec ces Fêtes de Polymnie où Christophe Rousset, d'une diligence impérieuse, dédaigne la générosité de György Vashegyi (cf. no 634).

L’« acte de ballet » Pygmalion résume un art protéiforme et une époque : pathos tragique, prodige aérien, grâces rococo, mise en abyme de le danse (dans tous ses caractères), célébration enthousiaste de l'Eros. Le rôle‑titre, taillé pour Jélyotte, combine lui‑même une diversité de tons telle qu'ont pu y briller le geste héroïque de Michael Goldthorpe (avec McGegan, Erato) comme la délicatesse si pénétrante de Jean‑Paul Fouchécourt (Niquet, Virgin).

Le nouvel enregistrement déçoit d'abord en raison des options de son chef. Le dessin strict que cultive Christophe Rousset a pour revers, quel que soit le professionnalisme des musiciens, une sécheresse du discours et de l'agogique qui se paie d'un manque de mystère ou de sensualité ‑ c'est quand même aussi le sujet. L’Ouverture n'est pas de bon augure, qui bouscule les traits de la partie notée « Vite » et fait trépider sans grandeur les doubles croches. La suite trahit une certaine indifférence aux climats: l'entrée de l’Amour (« Gravement ») est anodine, les Grâces ou le « Gracieux » ne suscitent guère d'abandon, de sourire, l'euphorie du dénouement paraissant bien courte. Non que les danses ne produisent de beaux moments (sarabande, pantomimes) et même de la nouveauté (deux gavottes jamais entendues là, source non précisée), mais grever la loure avec des timbales ? La leçon de danse est certes donnée avec plus de verve que dans l'enregistrement des Arts Florissants, moins de flexibilité aussi. On s'agace d'un clavecin invasif, qui parasite par sa broderie la suspension harmonique de cette vie sacrée qui touche la Statue. 

Les voix incarnent la chair théâtrale de l'oeuvre avec moins de franchise que le quatuor animé par Hervé Niquet. L’Amour d'Eugénie Warnier a de l'autorité sinon l'aura d'une Yakar ou d'une Piau, et Céline Scheen épouse bien la voix de la Statue. Mais pourquoi Marie‑Claude Chappuis, vaguement offensée, neutralise‑t­elle l'éclat tragique de Céphise ? Quant à Cyrille Dubois, il fait montre d'un chant assis et raffiné, individuel, d'une palette appréciable de couleurs et de nuances, osant aussi une ornementation plus étendue qu'à l'ordinaire dans « Règne, Amour ». Le verbe est soigné, mais monte en épingle appuis ou intentions rhétoriques, sans toujours les intégrer au mouvement de la phrase comme faisait Fouchécourt. La conduite de la scène 3 paraît uniment élégiaque, sans marquer la résonance tragique de l'égarement ni différencier l'invocation à la divinité. Pourquoi si peu de majesté ou d'expansion dans « L'Amour triomphe », pourquoi éteindre flamme et transports dans une ariette aux vocalises dénervées, que l'orchestre achève de rendre froidement décorative ? « Lance tes traits dans nos âmes » ? Vraiment ?


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