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Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste:
Gaëtan Naulleau En 1972, un an après sa victoire au Concours de Bruges, Scott Ross broie du noir. Comment se fait‑il qu'une récompense aussi prestigieuse ne lui ouvre aucune porte, tandis qu'un concours similaire offre à un pianiste un tremplin durable ? Les temps ont, Dieu merci, bien changé pour les claecinistes, et le Concours de Bruges veille au rayonnement de ses lauréats par un partenariat avec le label Alpha. Jean Rondeau, premier prix en 2012, à vingt et un ans, en aurait bénéficié s'il n'avait pas eu déjà, l'oeil attiré par une major. Justin Taylor était à peine moins précoce quand il remportait l'édition suivante en 2015. Né en 1992 à Angers, il se trouvait, trophée en mains, à la croisée des chemins: il allait bientôt renoncer au piano, qu'il avait étudié au CNSM de Paris avec Roger Muraro en même temps que le clavecin avec Christophe Rousset et Françoise Marmin. Un « double cursus » rarissime à ce niveau, et qui laisse peu de doutes sur l'aisance instrumentale d'un jeune homme gâté par les muses. Le disque confirme: pas une mesure où le clavecin ne sonne pas avec plénitude ‑ dans un répertoire et sur un instrument, certes, flatteurs. Justin Taylor en impose par la richesse des timbres et la sûreté de son geste. Estce forcément une qualité ici ? Cette Portugaise, en sprintant, enjambe les savoureux accidents de parcours et les ombres. Les interprètes majeurs de Forqueray ont su mettre en scène une part d'incertitude tantôt joueuse, tantôt anxieuse. Méticuleux, Taylor n'est jamais pris en défaut de concentration, mais parfois de respiration : de cette respiration dense et lente par laquelle un claveciniste peut s'approcher du geste des violistes, et par là même des partitions originales que le cahier de 1747 transcrit pour clavecin. La résonance ne s'interrompt jamais sous deux mains gourmandes de tempos vifs, tout s'enchaîne, la ponctuation reste en surface de la phrase. Justin Taylor craint‑il le silence ? Blandine Rannou, sur le même clavecin en 2007, jouait au contraire de ses creux pour infléchir et tendre le discours (Diapason d'or, cf n° 557). Elle avait aussi pour elle une prise de son où l'instrument désormais célèbre d’Anthony Sidey, copie de Hemsch, nous laissait venir à lui dans un espace assez large et maîtrisé, propice à la rêverie. Ici, les micros de Ken Yoshida grossissent le trait, et leur proximité souligne ce qui peut être trop surveillé dans le jeu. Justin Taylor s'essaie, dans La Silva, à une suspension poétique qui lui échappe encore. Notre oreille perd le grand tableau mélancolique et se focalise sur les décalages appliqués et les trilles lentement modelés. Le meilleur est à chercher dans le plus rare d'un programme ingénieux: Taylor, qui a lui même transcrit les trois pièces manuscrites pour trois violes de Forqueray père, s'épanouit dans leur éloquence plus homogène. C'est, à vrai dire, chez François Couperin que nous sommes impatient de le retrouver. Disque prématuré ? Rappelons seulement que Benjamin Alard eut lui aussi l'occasion d'enregistrer très tôt, et à un rythme soutenu, après sa victoire à Bruges en 2004. Les recommandations enthousiastes de Gustav Leonhardt l'amenaient, déjà, chez Alpha. Ses premiers disques témoignaient d'une subtilité et d'une perfection de facture peu discutables, mais cent fois moins intéressantes que ce qu'il donne aujourd'hui en concert, fortifié et libéré par l'expérience. Mais lâché par son éditeur, ainsi va le monde. |
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