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Appréciation d'ensemble: |
Outil de traduction ~ (Très approximatif) |
Analyste: Roger‑Claude Travers
Le programme savant et
multicolore imaginé par les Incogniti riposte au brûlot satirique Il
teatro alla moda : d'une plume rageuse, Benedetto Marcello y fustigeait
les us musicaux à Venise vers 1720 et le compositeur à la mode, Vivaldi
évidemment. Ce que le patricien lui reproche est ce qui fait la sève de son
oeuvre, proclame Amandine Beyer, en s'engouffrant, plage 1, dans la
tonitruante Sinfonia de L'Olimpiade, torrent de basses
grondantes et frénétiques. Chez le Vénitien, tout est spectacle. Mais
réduire l'intensité expressive à la posture théâtrale du musicien est un
piège dans lequel Amandine ne tombe pas. Elle pénètre dans les méandres du
processus créatif de Vivaldi, si soucieux de plaire, en une approche
naturelle et sincère, où rien n'est forcé. Tout coule de source. Goûter aux
infinies couleurs de ses concertos est à ce prix. Écoutez, par exemple, le
finale du concerto composé tout exprès pour le violoniste saxon Pisendel.
Tout avance dans une fuite, éperdue, digne de celle de la bête traquée dans
La Chasse. Guettée, cajolée par ses Incogniti affûtés et précis, à un
instrument par partie, la soliste mime la scène en une ligne de violon très
souple, qui n'accroche jamais. Le temps d'un concerto, l'archet raconte une
histoire, avec ses digressions, ses rebondissements et son moment
d'intimité, le Iargo, invitation à l'émotion mélodique et à l’abandon
ornemental. Surprendre, toujours, comme ce coup de théâtre dans le troisième
solo du premier Allegro du RV 391 pour violon « discordé ». Le chant
lyrique d'un violon émerge étrangement de l'orchestre et couvre les arpèges
haletants du soliste, apportant l'apaisement au héros exalté. Mais que
serait un opéra pour archet sans une scène burlesque? Vivaldi joue avec les
timbres jusqu'à l'absurde avec le violon in tromba ‑ comprenez un
violon au chevalet trafiqué pour qu'il sonne comme une trompette, fabriqué
spécialement pour La Pietà. Rustique, rauque, animal sont les qualificatifs
qui viennent à l'esprit en écoutant un improbable accord râpeux de ce
monstre dans les thèmes de chasse des allegros du RV313, à ce jour inédit.
Joué piano dans L’Andante, il produit un murmure sourd,
imprécis et fragile, presque inquiétant... et tellement théâtral ! |
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