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Analyste:
Pierre Massé
Chantées par des artistes lyriques désoeuvrées en période de Carême, laquelle
voyait les portes de l'opéra désespérément closes, les Leçons de Ténèbres
de François Couperin ont partie liée avec une forme de théâtre sacré, « une
union continuelle de la grandeur et de l'émotion intime » (Pierre Citron).
Difficile d'articuler ce mélange d'austérité et de sensualité, de noblesse et
d'effusion des rocailles dont la maîtrise reste un grand défi. Disons-le sans
ambages : Lucy Crowe, à trop vouloir incarner son chant, se fourvoie dans un
perpétuel lamento haletant, aux limites du débraillé. On croirait la malheureuse
Armide ayant perdu l'usage de ses sortilèges (et de son latin) et pleurant la
perte de Renaud. On ne trouvera pas non plus chez Elizabeth Watts cette pureté
mélodique en dépit d'un contrôle du souffle plus soigné qu'enlumine l'orgue de
David Bates.
Mais cette Deuxième Leçon recèle davantage de périls, à commencer par une
exacerbation des affects sur laquelle achoppent les aigus de la soprano
britannique. La Troisième Leçon réserve, en son début, quelques beaux
moments dans les duos, les voix se complétant allégrement, mais les échappées
individuelles frôlent l'hystérie. Dans leur version pour deux sopranos, ces
Leçons ont trouvé en Christophe Rousset (Gens, Piau, Decca), William
Christie (Daneman, Petibon, Erato) et le plus récent Vincent Dumestre (Druet,
Lefilliâtre, Alpha) des ambassadeurs plus justes et inspirés. Le superbe
Stabat Mater de Sébastien de Brossard est à peine mieux servi : si les
parties chorales véhiculent l'émotion, les interventions solistes du choeur La
Nuova Musica (quel vilain pupitre de contre-ténors !) ne brillent ni pas leur
tenue stylistique ni par la beauté des timbres. Retour à Hervé Niquet (Glossa).
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