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Diapason # 650 (10/2016)
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Aparté 
AP126
Artalinna 
ATLA011
Code-barres / Barcode : 3149028077926  

 

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Analyste: Gaëtan Naulleau

 

Trois points communs entre deux albums que tout le reste oppose : deux musiciens rarement entendus chez Bach; deux programmes com­posites, qui se recoupent dans la Partita en si bémol; enfin deux prises de son efficaces. Celle de Frédéric Briant laisse le toucher ferme et nuancé de François Dumont s'installer dans une acoustique généreuse, qui aurait été fatale au geste incertain de Fabrizio Chiovetta. Pour ce dernier, Nicolas Bartholomée a pris le parti de micros assez proches, gages de présence ‑ mais ni d'intensité, ni de grandeur hélas.

Ce que propose Chiovetta nous échappe souvent, quand ce qu'il re­fuse transparaît nettement. L’austérité, la nervosité, le lyrisme, le brillant sont suspects à ses yeux. Dans l'immense premier volet de l'Ouver­ture en si mineur, il les fuit tant qu'il reste à la surface des textures et des tensions harmoniques ; l'orchestre imaginaire se disperse et s'essouffle à chaque mesure. La Sarabande, une des plus ombrageuses de Bach, rê­vasse et picore le clavier. « Liberté » : mot d'ordre de l'interview, glissée dans le livret, où Chiovetta se soucie du Bach improvisateur. Mais l'impro­visation n'est pas l'indécision qui nous fatigue ici, et la liberté ne saurait se réduire à cette nonchalance. Bach nous laisse libre de réaliser des choix expressifs, pas de bayer aux corneilles. « En écoutant votre interprétation, on ressent confusément que votre lecture s'invente à mesure qu'elle avance », remarque Sylvain Fort. Nous ne sommes pas loin d'entendre cela que nous formulerions autrement « cette lecture confuse se perd à me­sure qu'elle tente paresseusement d'inventer quelque chose. »

On reprocherait difficilement à Fran­çois Dumont (dont la belle intégrale Ravel sera bientôt suivie par les deux concertos) de ne pas lire les textes en profondeur. Sans négliger aucun détail, il équilibre les tensions har­moniques dans la Partita en si bémol. Dans le Prélude, la qualité du tou­cher s'accorde à une organisation des couleurs habile. Sur un socle solide, la guirlande de l'Allemande gagne l'ampleur et l'irrégularité de phrasé interdites à son collègue pressé. Un sourire en prime, el nous serions conquis. La Courante nous assure que Dumont sait jouer à la fois profond et mobile ‑ à la manière d'un Igor Levit (Sony), et d'un Pera­hia (Sony). Rien ne manque à la Sarabande, sinon ce sentiment de l'ins­tant et ce poids léger des silences qui nous laisseraient penser que la musique peut changer de cap. Ici, tout semble joué d'avance. L’ennui n'en demande pas plus pour s'ins­taller. il nous épargne dans la Suite anglaise en la mineur, mais se pointe à nouveau dans la Partita en do mi­neur, que nous avons le sentiment d’avoir déjà entendue mille fois ainsi, et encore dans la Suite française en si mineur, moins maîtrisée..

L’éditeur, dans ses notes d'intention, se félicite de réaliser un « projet pho­nographique » au propos compliqué, et ajoute :. « François Dumont a été rapidement pour moi un héraut évident pour cette mise en perspec­tive de l’oeuvre de Bach. » Un Walter Legge, certes, n'était pas toujours modeste.

 


   

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