Texte paru dans: / Appeared in:
*

Diapason # 627 (09/2014)
Pour s'abonner / Subscription information


Ricercar
RIC343




Code-barres / Barcode : 5400439003439 (ID444)

Consultez toutes les évaluations recensées pour ce cd ~~~~ Reach all the evaluations located for this CD

Appréciation d'ensemble:

Analyste: Denis Morrier

En 1603, Gesualdo confie à l'imprimeur napolitain Constantine, Vitale deux volumes de Sacrae Cantiones. Le second, à cinq, six et sept voix, ne nous est pas intégralement parvenu, mais il a récemment fait l'objet d'une reconstitution par James Wood (HM, cf no 611). Le premier (Liber primus) comprend dix‑neuf motets à cinq voix, destinés aux divers temps liturgiques. Si le contrepoint est d'apparence conventionnelle, avec ses fugues savantes et ses canons, il introduit néanmoins de suaves chromatismes et de fugaces excentricités harmoniques ‑ O vos omnes préfigure les pages plus tortueuses des Responsoria. Trouvant un équilibre inédit entre tradition et modernité, Gesualdo produit ici l'une des oeuvres les plus profondes, les plus originales et les plus personnelles. Ce Liber primus reste assez rare au disque, malgré l'enregistrement impeccable de Livio Picotti (Argo) et deux ou trois autres. La réalisation d'Odhecaton les éclipse toutes. Comme dans son excellente gravure de la Missa In illo tempore de Monteverdi (autre Diapason d'or), Paolo Da Col propose une extrême diversité de dispositifs polyphoniques, aussi convaincants les uns que les autres. Certaines pièces sont chantées a cappella par son magnifique chœur masculin : c'est le cas du somptueux 0 vos omnes d’ouverture, dont on admire l'intériorité grave.

La profondeur d'un timbre jamais lissé, à l'image des plus beaux orgues italiens, se double d'une grande souplesse dynamique. Paolo Da Col modèle cette matière généreuse par une conduite des voix analytique, où chaque chromatisme s'impose avec évidence. La principale originalité du programme est l'introduction des instruments (ainsi qu'il en était l'usage dans les concerts privés de la casa Gesualdo). Certains motets sont étoffés par un continuo aux cordes pincées (Domine, ne despicias), qui jamais ne parasite le discours: réalisé avec goût et subtilité, il soutient et colore la polyphonie. Un cornet suave vient parfois souligner la partie de soprano (Illumina faciem tuam), ou s'adonne à d'époustouflantes diminutions virtuoses au‑dessus du choeur. A l'inverse, d'autres motets échoient à un ensemble de violes d'où émerge le seul soprano lumineux d'Alessandro Carmignani.

Liuwe Tamminga ponctue l'album de pièces d'orgues empruntées aux glorieux prédécesseurs de Gesualdo: Luzzaschi et Macque, Leurs sidérantes Stravagaze sont mises en valeur par les sonorités singulières et le rugueux tempérament mésotonique de l'orgue Rubino de l'église S. Bernardino de Molfetta (1767). Un superbe enregistrement, aux antipodes du a cappella résolument chambriste et sophistiqué de la Compagnia del Madrigale dans les Responsoria (Diapason d'or. cf no. 624), mais non moins prenant. Et bienvenu pour rendre justice à ce recueil mésestimé.  

Fermer la fenêtre/Close window

 

Cliquez l'un ou l'autre bouton pour découvrir bien d'autres critiques de CD
 Click either button for many other reviews