Texte paru dans: / Appeared in: Code-barres / Barcode : 3700675500177 |
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Appréciation d'ensemble: | |
Analyste:
Isabelle Ragnard Que serait un troubadour, auteur des mots et des mélodies, sans son interprète, le jongleur ? Des châteaux aux places de villages, jongleurs et jongleresses ‑ car le métier est aussi féminin ‑ diffusent les compositions des poètes occitans. Ils adaptent d'anciennes mélodies à des vers sans musique (contrafactum), improvisent des accompagnements, font danser une société féodale friande de nouveauté. Leur art éphémère a disparu avec eux puisque leurs performances n'ont pas été notées. Quoique... Les manuscrits, copiés des dizaines d'années après la période d'activité des troubadours, conservent‑ils « la » version de l'auteur, ou plutôt les variantes introduites par les jongleurs au fil du temps ? Le collectif
Alla Francesca a mené son enquête, pour mettre à jour les interprétations
innovantes des jongleurs. Comme dans les romans courtois, Brigitte Lesne et
Vivabiancaluna Biffi s'accompagnent de leur instrument à cordes puis cèdent
la place à leurs deux compagnons, qui inventent des estampies trépidantes
sur la base, d'airs connus (Reis glorios). Le mélange, de prime abord
classique, de vièle, harpe, flûtes et percussions introduit aussi des
instruments médiévaux souvent mentionnés dans les textes de l'époque mais
négligés dans les restitutions modernes: la profonde harpe‑psaltérion (rote)
et l'incisive flûte de pan médiévale habituellement associée aux bergers (frestel).
Le programme joue sur la diversité des musiques colportées par les jongleurs
d'Occitanie, des chants d'amour troubadouresques aux conduits sacrés des
abbayes d’Aquitaine. En portant une attention particulière sur les positions
féminines: chanson de malmariée, poème de la comtesse de Die et, encore plus
rare, une discussion (tenson) entre deux femmes. Le dialogue heureux entre
les voix féminines se poursuit dans les deux poèmes volontairement
discordants (descorts), dont le curieux Eras quan vei verdeiar en
cinq langues de Raimbaut de Vaqueiras. Si les chanteuses distillent
l'émotion, la créativité de Pierre Hamon (flûtes et cornemuse) et du
percussionniste Carlo Rizzo pétille à tout instant. |
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