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Diapason # 659 (07/2017)
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Encelade ECL1601



Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Philippe Ramin

Ce voyage à travers la musique de Frescobaldi en dit beaucoup sur les goûts et les passions d'un jeune claveciniste français encore discret, admiré par ses pairs pour son aisance quand il s'assoit au clavier et improvise comme d'autres respirent. Un art qu'il a appris de Freddy Eichelberger. Yoann Moulin est aussi allé chercher les conseils de Pierre Hantaï, Blandine Verlet ou Skip Sempé, après un parcours sans faute au Conservatoire national supérieur de Paris.

Son programme présente différentes ramifications autour du genre de la toccata italienne, dont Frescobaldi n'est pas l'inventeur, mais dans laquelle il mêle au plus haut degré techniques d'écriture anciennes et modernes. Le contrepoint hérité de la Renaissance y alterne avec la rhétorique de la seconda prattica : l'expression au clavier se réappro-prie les figures de la vocalité, et tout particulièrement du madrigal, alors florissant. A trois toccatas s'ajoutent des pièces à la polyphonie plus linéaire mais aussi plus savante (recercar, canzone) et des formes à variations (dont les deux plus ambitieuses chez Frescobaldi, la Romanesca, et les Cento Partite sopra Passacagli). Elles sont partagées entre deux remarquables instruments : un italien, de Philippe Humeau, qui est une libre interprétation dans le style du XVIIe siècle, et un virginal de Jean‑François Brun inspiré d'un anonyme italien.

Manifestes d'un idéal sonore plus que serviles copies, l'un et l'autre sont en phase avec l'atmosphère très singulière qui se dégage du jeu de Moulin. L’intermédiaire du clavier semble avoir proprement disparu. L’extrême souplesse du toucher, cette manière permanente d'arpéger nous pIongent dans un lointain passé où la technique de clavier se devait de produire un effet proche des luths et autres théorbes.

 Particulièrement éloquente dans le Ricercare, dont les angles adoucis génèrent des rencontres harmoniques savamment floutées, cette distance poétique réussit également aux deux partitas variées, où les accents de la danse émergent fugacement d'une matière résonante, mais concluent sauvagement la Folia. Moulin fait le pari d'étirer les fameuses Cento Partite à un tempo d'une lenteur sans précédent au disque (plus de quatorzes minutes, quand certaines versions passent allègrement sous la barre des dix); il le tient avec des qualités d'organisa tion structurelle remarquables. On admire autant la montée, en puissance progressive, et il sait jouer du morcellement qu'impose ce tempo. Les épisodes descriptifs basés sur le lamento et les chromatismes bénéficient d'un accord mésotonique modifié particu-lièrement éloquent, où le déliquescent voisine avec la belle consonance.

En forme de clin d'oeil, une piste cachée en fin de disque referme le rideau de ce spectacle véritablement envoûtant sur l'ultime variation sopra Ruggiero. Il faudra suivre ce poète.


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