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Diapason # 648 (07-08/2016)
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NoMadMusic 
NMM016




Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Gaëtan Naulleau

L’emploi d'un clavecin différent pour chaque partita n'est pas la seule originalité d'un album brillant et courageux, qui pourfend deux clichés tenaces sur la jeune garde baroque : elle aurait perdu la fibre expérimentale de ses aïeux, et se complairait dans une vélocité superficielle. Si l'aisance instrumentale de Jean‑Luc Ho flatte l'oreille autant que dans son premier album (Diapason découverte, cf. n° 597), elle s'exprime dans des tempos toujours mesurés, parfois très retenus. Le Capriccio en do mineur et l'austère Gigue en mi mineur en font les frais, mais partout ailleurs l'ampleur du geste unifie une foison de détails expressifs ‑ quels reliefs dans l'immense Allemande en , les voluptueuses volutes de la Sarabande en si bémol, la Burlesque et le Scherzo en la mineur, où des poses capricieuses alternent habilement avec des sections pince‑sans‑rire. Quand il presse le pas, pour le Prélude en sol, Jean‑Luc Ho déambule avec une réjouissante nonchalance. Sa générosité n'est pas dans l'exaltation virtuose ‑ dimension hors champ de sa vision ‑ mais dans la richesse de la diction et des couleurs. L’élan chorégraphique ne prend jamais le dessus: la Gigue en si bémol caresse l'oreille par une grande vibration continue.

 

Autre originalité, moins heureuse l'ordre choisi. Que Jean‑Luc Ho s'écarte d'un plan tonal savamment tracé par Bach peut se comprendre ‑ il s'agit d'un plan éditorial, pas d'un plan de concert. Mais lever le rideau sur la Sinfonia en do mineur, c'est renoncer à l'un des plus beaux débuts en musique, cette image de la naissance que Bach offre au fils de son ancien prince ( tour de deux notes à nu, au centre du clavier, se déploient peu à peu des spirales). Ce prélude résonne sur un instrument à la fois clair et opulent, le seul de type français choisi par Jean‑Luc Ho (Emile Jobin d'après Christian Vater).

 

Les cinq autres clavecins illustrent la disparité d'une facture allemande dosant diverses influences, et prisant parfois une palette assez nasale (le Jobin d'après Johann Christoph Fleischer joué dans la Partita en sol). La grande Ouverture à la française (l’un des rares moments où le jeu si souple de Ho s'essouffle) prend les couleurs d'une copie de Mietke, la Partita en la mineur scintille sur celle d'un Conrad Fleischer. Les Partitas en do et mi mineur impressionnent, sur deux créations dans le style allemand de Jonte Knif : clavecins puissants et onctueux, à la résonance aussi longue que les meilleurs instruments flamands mais à la diction typiquement allemande et aux graves dignes d'un orgue. L’effet est saisissant dans les deux portiques. Partagée entre la majesté de cette matière sonore et l'impatience tourmentée de l'expression, la Sarabande en mi mineur est le point culminant d'une intégrale osée et assumée, inclassable car aussi diverse d'inspiration, de timbres et de manière que le recueil dans lequel Bach montrait toute l'étendue de son art.

 

 


 

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