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Outil de traduction ~ (Très approximatif) |
Analyste: Philippe Venturini Ce cinquième disque d'une série commencée voici plus de vingt ans rappelle que l'interprète a noué un intense dialogue avec le compositeur. La discussion reste brillante et parfois mélancolique.
Mieux qu'une habitude, c'est
devenu un rendez-vous. Qui éprouve parfois la patience des mélomanes : il
aura fallu en effet attendre dix ans (!) pour que Pierre Hantaï retourne
auprès de son (notre) très cher Scarlatti. Ce quatrième volume confié à
Mirare constitue en fait le cinquième disque, étape (la première chez
Astrée) d'un parcours qu'on imagine planifié sur le long terme mais qu'on
sait sans l'objectif d'une intégrale. « Surtout pas », déclarait en effet
l'artiste dès le volume 2 pour Mirare. L'irrégularité des visites (1992,
2002, 2004, 2005 et 2015) n'a manifestement pas affecté la qualité de la
relation entre le compositeur et son interprète même si elle a évolué. Si le Scarlatti des débuts, drôle d'oiseau, ne pensait qu'à piquer du bec et à griffer de ses ergots, il n'hésite pas aujourd'hui à faire la roue et à déployer une riche palette de couleurs. Pour séduire, évidemment, mais aussi pour dissimuler derrière cet arc-en-ciel son vague à l'âme. Bien sûr, le Scarlatti de Pierre Hantaï n'a rien perdu de sa superbe, de son assurance, et ce dès la première sonate (K. 212) qui fait courir les deux mains et dessine de puissants traits de guitare. On peut également citer la K. 533, qui lance les doigts à la conquête du clavier dans une folle course-poursuite passant par le jeu de 4', ou la torrentielle K. 201 au débit continu malgré de nombreux coudes et accidents. Mais, par-delà sa virtuosité triomphante, ce Scarlatti nouveau se montre plus généreux, plus lyrique, plus mélancolique. En témoigne la célèbre K. 208, enregistrée pour la troisième fois, après 1992 et 2002, dont la durée s'étire sensiblement mais, surtout, dont l'ornementation s'épanouit et le relief se creuse. La ligne s'étire, le léger décalage entre les deux mains se marque davantage pour entretenir le son, le rubato prend ses aises: paradoxalement ce luxe décoratif met à nu la pensée intime du compositeur. Si le soleil, les castagnettes et les coups de talon n'ont pas totalement disparu, ils cèdent peu à peu la place à une lumière plus basse, celle qui étire les ombres et perce les masques.
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