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Analyste: Jean‑François Lattarico D'un couronnement à l'autre. Mais cette fois, le prince en pince pour une idiote. La starita du décadent librettiste Morselli est bien éloignée des ambitions voluptueuses de Poppée. Donné au Sant’Angelo de Venise en 1717, L’incoronazione di Dario nous transporte en Perse, thème à la mode dans les théâtres de la Sérénissime depuis la seconde moitié du Seicento (voyez la Statira de Cavalli de 1655). Le sixième opéra du Prêtre roux est musicalement un des plus réussis. L’intrique abracadabrantesque tourne autour de trois prétendants de la princesse Statira, héritière du défunt roi Cyrus : le noble Darius, le bel Oronte et le belliqueux Arpago. Leurs projets sont entravés par l'intrigante Argene, soeur de Statira, amoureuse de Darius, et prête à commettre un uxoricide pour conquérir le trône. Elle sera démasquée. Les beautés abondent dans cette partition pauvre en autoplagiats. Les mélismes de « D'un bel viso », le rythme chaloupé de « Io son quell'augelletto », l'arioso intensément nostalgique de « Caro amato e dove sei » sont du meilleur Vivaldi, comme l'instrumentation de la véritable cantate « Ardo tacito amante » ou l'air obligé avec basson et violone « Non lusinghi il core amante ». Trente ans après la résurrection de Gilbert Bezzina (Ledroit, Lesne, Visse, Mellon... HM, 1986), l'équipe aguerrie et l'orchestre subtil de Dantone l'emportent aisément. Le disque livre un reflet biaisé de concerts donnés à Beaune, avec une distribution légèrement différente. Le rôle de Statira confié à Sara Mingardo en ressort grandi (mais la voix n'est‑elle pas trop somptueuse pour un personnage aussi falot ?), tandis que David Q Lee cède la place à une Sofia Soloviy pleine de mordant malgré des aigus un peu stridents. Tous les autres rôles sont parfaitement distribués, marqués notamment par l'aplomb de Delphine Galou et de Riccardo Novaro, toujours impeccable. Seul point faible: Anders Dahlin, en méforme, éprouvé par une tessiture bien trop grave pour lui (son aria di sdegno qui clôt le second acte « Col furor ch'in petto io serbo » frise l'insupportable). C'est d'autant plus dommage que l'orchestre évite l'écueil des contrastes trop appuyés, au profit d'un équilibre plus apte à faire ressortir les figures de l'éloquence.
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