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Outil de traduction ~ (Très approximatif) |
Analyste: Sophie Roughol Amarilli, mià bella, Non credi, o del mio cor dolce desio... Amarilli e il mio amore ». Élégie faussement simple de Caccini, texte arcadien de Guarini, un tube, aujourd'hui comme hier. On ne compte plus les voix, narcissiques ou indolentes, qui ont transformé la pépite en loukoum bourgeois... Allez plage 8 et écoutez : ce tempo qui refuse la langueur; cette déclamation claire comme l'eau vive, ce timbre sans fards, cette subtilité imperméable au pathos ! Combien de chanteurs osent aujourd'hui un récital entier dans ce répertoire à cheval sur la culture de la Renaissance et les premiers feux du baroque ? Marc Mauillon prend le risque de lasser l'auditeur qui suivrait d'une seule traite un programme si intime. Mais à vrai dire, le risque disparaît si nous le laissons nous guider au coeur de ces poésies merveilleuses qu'il sert à travers la musique. Reconnaissable en trois notes, son émission refuse le moule du bel canto et sa « couverture » qui arrondit l'aigu. Dans le récent DVD du Vénus et Adonis de Blow, nous regrettions son Adonis « plébéien ». Il est ici princier, incarnation crédible de la fameuse « sprezzatura » (l'art qui s'oublie au profit de l'élégance... de Castiglione dans son Livre du courtisan. Le secret ? « Une apparence de facilité et de désinvolture ». Le programme rapproche Caccini, héros du chant orné au tournant du XVIIe siècle, et Jacopo Peri (1561‑1633), issu de la noblesse florentine, organiste et chanteur. Les deux Orphée se répondent ainsi, loin de la rivalité qui fut la leur dans une Florence inventant au sein de ses camerata la nouvelle monodie accompagnée. La musique est « le texte, le rythme, puis le son » (Caccini). Marc Mauillon règle son compte au beau son ‑ le texte suscite l'intention, l'art oratoire. Puis les appuis, les ornements, les dynamiques du chant doublent l'intention pour porter le texte et les mots à leur impact maximum. Souvent vif, le tempo ne se complaît jamais dans une tendresse de surface: c'est bien le souffle qui la suggère, suit ses fluctuations, et s'amenuise jusqu'au presque rien dans la douleur. Mais ce sont des poèmes d'amour, dira le sage. Aucune crainte, il se glisse dans un rayon de soleil éclairant la voix, et encore dans la harpe double d’Angélique Mauillon. Toujours éloquente et miraculeuse de complicité, elle nous gratifie en intermèdes de deux pièces de Luzzaschi et Piccinini. Sa présence lumineuse, son halo de résonances, qui à la fois porte le ténor et le laisse évoluer en toute liberté, tient une part déterminante dans un disque courageux.
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