Texte paru dans: / Appeared in: |
|
Appréciation d'ensemble: |
Outil de traduction ~ (Très approximatif) |
Analyste: Denis Morrier Les grands disques de harpe baroque se comptent encore sur les doigts des deux mains : la renaissance de l'instrument est assez récente, les facteurs n'ont pas fini d'expérimenter, des perspectives expressives nouvelles se dévoilent tandis que les interprètes façonnent et affermissent une technique émancipée de la harpe moderne. Et c'est tout cet esprit d'aventure, associé à la richesse d'un répertoire italien méconnu, qui nous saisit dans l'album de Margret Köll. Dès les accords lançant la Toccata seconda de Trabaci, un charme puissant opère. A l'envol du premier passaggio, l'éblouissement survient et la magie du stile fantastico s'impose définitivement. Une prise de son flatteuse nous projette au coeur des sonorités d'une harpe voluptueuse (copie par Eric Meinmann de la harpe Barberini du Musée instrumental de Rome). Elle révèle surtout l'infinie délicatesse de toucher de Margret Köll, jeune harpiste autrichienne, élève d’Andrew Lawrence‑King et Mara Galassi. Ses deux maîtres ont chacun laissé un disque de référence consacré aux répertoires du baroque naissant. L’Anglais avait ressuscité « The Harp Luduvico » (Hyperion) et l'Italienne « Il viaggio di Lucrezia » en 1998 (Glossa, hélas mal enregistré): deux anthologies renvoyant aux deux pays d'élection de l'arpa doppia (harpe chromatique à double rang de cordes), l'Espagne et l’Italie, Le nouvel album puise aux mêmes sources, tout en se singularisant. Margret Köll a organisé son programme autour des compositeurs et oeuvres d'avant‑garde diffusés à la cour des vice-rois espagnols de Naples, au XVIIe siècle. Les Italiens de Campanie, soumis aux influences des péninsules ibérique et italique, figurent en bonne place. On entend ainsi la Gagliarda del Principe di Venosa (Gesualdo), dont les chromatismes erratiques gagnent, sous ce toucher nuancé et articulations dynamiques, une saveur étrangère à la plupart des versions au clavecin. Les pièces, plus spéculatives encore, de Giovanni De Macque, et Ascanio Mayone, autres expérimentateurs « chromatiques » campaniens, sont jouées avec une transparence et une lisibilité du contrepoint confondantes d'intelligence. Mais Margret Kröll excelle surtout à nous séduire, notamment dans les danses ciselées de Lucas Ruiz de Ribayas, ou les Romance et autre Pavane délicieusement évocatrices de Cabezon. La harpiste virtuose se libère dans les amples architectures de Trabaci, où la diversité des coloris et des nuances impressionne autant que son agilité. Fusionnant maestria digitale et fuego poétique, cette magnifique interprète a su s'approprier l’éloquence supérieure des mythiques citharèdes. |
|
|
|
Cliquez l'un ou l'autre
bouton pour découvrir bien d'autres critiques de CD |