Outil de traduction (Très approximatif)
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Analyste:
Gaëtan NauIIeau
Des
trois recueils de Suites pour clavier laissés par Bach, les Partitas (le
dernier, le plus ambitieux, le plus exigeant) ont depuis toujours la préférence
des pianistes. Des deux autres, ils visitent plus volontiers les amples
Suites anglaises que leurs petites soeurs « françaises », dont l'apparente
modestie ne paie pas. C'est qu'elle leur impose de scruter, sous la surface
d'une écriture limpide et concise, une richesse de caractères et une variété de
texture que leurs collègues clavecinistes décryptent bien plus facilement.
Perahia en faisant pourtant son miel il y a quelques mois, et nuançait dans
chaque suite une palette choisie (DG, cf no 651). Koroliov, bachien passionnant
dans les Inventions, le Clavier bien tempéré ou les Goldberg, y
traversait un interminable paysage lunaire aux reliefs indifférenciés (Tacet).
D'une Russie à l'autre, les partis pris tranchés qu'il s'interdisait
foisonnent sous les mains d'Ekaterina Derzhavina. Un mélange singulier de
formalisme, d’imagination et d'exaltation analytique fait écho aux
extraordinaires Variations Goldberg parues en 1994, dans la foulée du
prix qui' révélait la jeune pianiste au Concours Bach de Leipzig (Arte Nova).
Des micros proches laissent mesurer, sur un instrument aussi mat qu'en
1994, l'intensité du toucher. Aucun détail n'échappe à son contrôle, Le
crépitement d'ornements décochés forte dans les reprises de la Gigue
en do mineur fait son effet ‑ comme dans celle en mi ! Parler ici
d'un art de la danse (donc de respiration et de suspensions infimes) serait
exagéré, mais l’appétit rythmique de ce piano fait l'affaire (Gigue en
si mineur).
Les nombreux jeux de timbres ne visent jamais la séduction, mais
participent d'un discours puissamment renouvelé au fil de chaque mouvement, aux
antipodes du geste synthétique de Perahia, magicien des équilibres instables. L’Allemande
en mi bémol, fleuve homogène, dont les pianistes travaillent d'habitude
les reflets, rencontre ici des rives sinueuses ‑ creusées par les variantes
adoptées et l'ornemen-tation des reprises. Les courantes pressent le pas,
choix discutable mais fertile en caractères : ouragan staccato en mi majeur,
dialogue noble et nerveux en ré mineur, tarentelle trompettante en do
mineur, martèlement têtu (et pénible) en si mineur.
Le texte suggère
un contretemps ? Derzhavina s'en empare et l'accentue, dans une lecture parfois
naïve de l'écriture de Bach. Elle coupe plus d'un cheveu en quatre ‑ pauvre
Ailemande en sol. Les ficelles qui nourrissent la variété du jeu paraissent
çà et là un peu grosses mais se révèlent toujours cohérentes. Et les idées
abondent tant que la plus arbitraire ne tarde pas à être éclipsée par une
trouvaille splendide. Qui sait si nous n’en revendrons pas plus souvent sur ces
montagnes russes, en levant les yeux au ciel, que dans l'oasis de Perahia.
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