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Analyste:
Philippe Ramin Adrian Butterfield se lancerait-il à l’assaut des quatre Livres de Leclair, monument du violon en France au temps de Vivaldi, Bach et Rameau (les amateurs parisiens découvrent le volume initial en 1723, année des Quatre Saisons, et le dernier en 1743, tandis que triomphent Les Indes galantes) ? Il nous offrirait la première intégrale d’un ensemble capital. Après le Livre I (2 CD Naxos parus en 2009), voici donc le Livre Il (1728), où Leclair n’expose pas encore le violoniste aux nouveautés techniques des deux derniers (positions hautes, double cordes, tonalités ardues). Il invite d’ailleurs les flûtistes à s’approprier quelques-unes des douze sonates. Le gracieux prédomine, le chant élégiaque se mêle aux figures obligées de la danse. Le sérieux de la Sonate en mi mineur (sublime premier mouvement), les chromatismes du Fugato de la Sonate en do annoncent la densité des sonates en trio de l’Opus 4 (1734) et les Sonates en si bémol et ré (nos 7 et 6) sont déjà très acrobatiques. Adrian Butterfield élabore très finement ses phrasés. Les moyens mis en oeuvre s’effacent derrière l’aisance du propos. La souplesse des articulations, le raffinement de l’archet sont entièrement au service de la phrase, d’un legato de chanteur émaillé de consonnes subtiles. Le violoniste ne se complaît jamais dans le registre charmant (Allegro en la majeur), et évite l’écueil des sons systématiquement filés. Le mélange d’abandon et de fermeté caractéristique de certains mouvements introductifs (Sonate en sol) est élégamment tourné. Dans l’Aria en la, l’habileté des doubles cordes (effet délicatement expressif plus que performance virtuose) imposent avec douceur l’évidence des caractères. La Sicilienne qui ouvre la Sonate n° 7, en si bémol, est à la fois une danse mélancolique et un air d’opéra italo-français, cette précieuse alchimie est merveilleusement préservée. De même le court Adagio de transition (Sonate n° 9) révèle le cantabile très charmeur du violoniste. On connaît aussi bien à la viole qu’au violoncelle l’impérieuse personnalité de Jonathan Manson, de nouveau un parfait complice dans ce projet remarquable. Efficace et attentif, le chef et claveciniste Laurence Cummings se contente d’être constamment impeccable et de bon goût. Que manque-t-il aux visiteurs de notre glorieux Leclair pour séduire tout à fait? Peut-être une palette sonore plus diversifiée, qui s’éloignerait davantage d’un jeu presque moderne dans son homogénéité. Mais ne boudons pas notre plaisir, surtout dans le cadre d’une intégrale inespérée. |
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