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Analyste: Denis Morrier Enfin un contreténor qui ne souhaite pas s'identifier aux Farinelli, Caffarelli et autres athlètes du bel canto baroque ! Raffaele Pe s'est penché sur la figure plus secrète de Gualberto Magli, castrat de la cour des Médicis, mentionné à diverses reprises dans la correspondance entre les fils du duc de Mantoue. Son nom apparaît ainsi au moment de constituer la distribution de la première représentation de L’Orféo en 1607. Les Mantouans focalisent toute leur attention sur ce chanteur, élève de Caccini, que le grand‑duc de Toscane a bien voulu leur « prêter » pour l'occasion. C'est à lui, dans L’Orfeo, que les principaux rôles de soprano sont confiés: La Musica (prologue), Proserpina (acte IV) et vraisemblablement Speranza (acte 111). Pour les princes Gonzague, il est « le meilleur » parmi les sopranos de Florence et, à l'issue des répétitions, il a « déclamé avec tant de grâce et d'effets qu'[ils sont] très satisfaits de lui ». L’album, qui enchaîne les trois scènes de L'Orfeo composées pour Magli, nous montre que Monteverdi a travaillé sur mesure pour valoriser sa palette expressive: déclamation lumineuse pour la Musica, autorité pathétique pour la Speranza, et sensualité éloquente pour Prosperpine. Raffaele Pe, falsettiste au timbre capiteux et à l'élocution savoureuse, incarne avec probité et profondeur ces admirables scènes en pur stile rappresentativo. Le reste du programme introduit des pièces à l'ornementation plus exigeante, que Raffaele Pe aborde avec sobriété. Il évoque alors la suite de la carrière du castrat à la cour des Médicis (empruntant aux recueils des Caccini et de ses épigones), et surtout son séjour brandebourgeois en 1615‑1616: l'occasion d'entendre une nouvelle et poétique version de l'émouvant Jetzund kömpt die Nacht herbey de Johann Nauwach, révélé dans un disque inoubliable d’Andreas Scholl. Les exigeantes parties de basse continue sont réalisées avec grâce et invention par Chiara Granata à la harpe à triple rang de cordes (qui nous régale, en guise d'intermède, d'une ritournelle de Possente spirto), et par le luth délicat de David Miller. Ce récital de haute tenue présente une ultime singularité: une composition originale d'Alessandro Ciccoiini (né en 1970), à la manière des monodistes florentins, sur un sonnet de Pétrarque (Solo e pensoso): exercice de style bluffant tout autant que poignant. |
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