À l'heure où fleurissent les al­bums à concept, on les préfère comme celui‑ci, pertinent et subtilement réalisé. Sous‑titré The Birth of Opera, ce nouveau projet de Nicolas Achten retrace les origines du genre au fil des adaptations du mythe d'Or­phée : Monteverdi, Rossi, Peri, Caccini sont bien sûr du voyage, qui inclut de splendides trouvailles ‑ ainsi ce Muove Orfeo de Landi. De ce programme adroit aux transitions raffinées, Achten sait faire un écrin pour on propre talent, l'essentiel lui en étant consacré. La voix, onc­tueuse et souple, modèle chaque syllabe avec chaleur et délica­tesse, les nuances abondant dans le piano. Également continuiste, le baryton mène depuis la harpe, le théorbe ou le clavecin, ses musiciens, eux aussi attentifs à chaque ondulation du phrasé. Ce qui fait défaut à cette anthologie d'opéra, c'est le théâtre. Peu avide de saillie ou de relief dramatique, Achten tire ces airs du baroque naissant vers le madrigal de la prima prattica. Dissonances et ruptures sont absorbées par un maniérisme contemplatif, et les contrastes, confinés dans un registre restreint, n'empêchent pas l'impression de monotonie d'une plage à l'autre. Les brèves et rares interventions de Déborah York ne rehaussent pas, malgré la beauté du timbre, le ton quelque peu tiède de l'approche choisie. Reste à saluer la somptueuse sonorité du cornettiste Lambert Colson, et celle des Scherzi musicali au complet, riche en couleurs suaves et impeccablement accordées.