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Crépuscule baroque UN EXCELLENT MAÎTRE D’OEUVRE ET UN CASTING DE VEDETTES POUR « ERCOLE » DE VIVALDI ONT DONNÉ UN RÉSULTAT AU DISQUE TRÈS CONTROVERSÉ. DÉBAT. Quel plaisir de retrouver Fabio Biondi en terres vivaldiennes! Deux décennies après ses fameuses Quatre Saisons, quelques années après son premier enregistrement d’opéra, le pastiche Bajazet, le chef et violoniste italien revient à ses premiers amours avec Ercole, créé à Rome au Teatro Capranica, en 1723. L’orchestre vivaldien déploie ici toutes ses splendeurs, toute sa tonicité et sa verve, sans que Biondi éprouve le besoin de forcer le trait comme certains de ses collègues en ont pris la désagréable habitude. Quant à l’oeuvre, « véritable bande-annonce de son savoir faire lyrique » selon Frédéric Delaméa, c’est un festival de traits virtuoses et de couleurs instrumentales, où Vivaldi se montre, comme souvent, meilleur compositeur que dramaturge : on écoute avec un intérêt toujours renouvelé, malgré un livret comme souvent abracadabrant et des caractères limités à l’esquisse. Bref, on ne suit pas toujours l’histoire, mais le plaisir musical est constant! Très dramatique, attentif aux récitatifs et à l’enchaînement des climats, Biondi sait maintenir l’attention et laisse les gosiers s’affronter. Comme au cinéma, on assiste alors à une suite de numéros d’acteurs. A ce petit jeu, Vivica Genax, Joyce DiDonato et Philippe Jaroussky sont particulièrement éblouissants. Ils vocalisent comme à la parade: les fans seront comblés. Pour l’émotion, car il y en a tout de même, on réécoutera plus d’une fois les airs chantés par Romina Basso — ce sont les plus beaux de la partition —, dont elle sait tirer le meilleur. Sur ce générique sans tache, on sera plus intrigué de trouver le nom de Rolando Villazón, sans doute hors style, mais qui il a le mérite de faire vivre son personnage avec flamme. On pourrait émettre quelques réserves liées à des étrangetés de montage (CD 1, plage 13 à 1’53) et à un choeur insuffisant mais heureusement rare dans Ercole. Cela ne suffit pas à gâcher notre bonheur. Pierre Massé
Le mieux, dit-on, est souvent l’ennemi du bien... Alors est- ce l’attente? L’effet d’annonce? Le cast trop luxueux? Ou les conditions de « fabrication » de cette intégrale, suspendue aux problèmes vocaux de Villazón? Lenthousiasme est plus que douché à l’écoute de ce Vivaldi remonté par Blondi. Musique superbe, le Prêtre Roux ayant tout mis en oeuvre pour séduire le public romain qu’il prenait alors d’assaut. Airs enivrants, sortis de son best-of le plus pertinent. Et pourtant, contrairement à maintes intégrales parues chez Naïve, le charme n’opère pas. Patchwork plus que projet abouti, l’ensemble apparie des voix trop différentes et guère adéquates. Villazón n’a rien à faire dans ce répertoire. Tendant vers le vérisme et le pathos, son timbre s’échappe à de nombreuses reprises vers des incongruités ornementales. D’au tant que les « raccords » font plus que s’entendre, ses airs ayant été enregistrés et rajoutés des mois après la première prise. On surprend Diana Damrau fâchée avec la justesse. Aigus mal maîtrisés, sons tubés : mais qu’est-elle venue faire dans ce Vivaldi? Comme Joyce DiDonato, Ciofi fait du Ciofi, sans plus, ayant bien du mal à exister face aux seules stars de cet enregistrement : la fluide et ensorceleuse Vivica Genaux et le timbre rare et racé de Romina Basso. Lehtipuu et Jaroussky figurent les seconds couteaux de luxe, sertis par un Biondi à son aise, mais trop violent pour élaborer une pensée d’ensemble. À trop faire luxe, ce Vivaldi tant annoncé s’avère fade, très loin du précédent Bajazet. Tout le monde ne peut chanter Mascagni : il en va de même du baroque. Malgré ses faiblesses, on restera fidèle à la production scénique d’Alan Curtis, disponible sur deux DVD chez Dynamic... Un comble! Vincent Borel | |
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