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Diapason # 471 (06/2000)
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Harmonia Mundi
HMG 505247




Code-barres / Barcode : 0794881944729

Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Roger Tellart

Au fait de toutes les influences et expériences du siècle, Caspar Kittei, formé par Schütz à Dresde, puis acquis à la manière italienne lors d'un séjour dans la péninsule de 1624 à 1628, fut un champion de la modernité et du nouveau style en musique. Son oeuvre, interrompu par la mort à trente‑six ans, vaut surtout par le recueil d'Airs et Cantates profanes paru en 1638 et dont le présent album revisite onze titres. Une livraison majeure dans l'histoire de la musique allemande, s'agissant de la deuxième transposition en langue vernaculaire du style monodique illustré en Italie, au début du siècle, par Caccini (Nuove Musiche) et Peri (Varie Musiche). Les textes en sont pour la plupart empruntés au poète Martin Opitz et se font profession de foi amoureuse et hédoniste (le carpe diem cher aux Anciens), mais n'ignorent ni la séparation ni la mort. Reste que l'essentiel est dans la musique, où un auteur captivant se révèle, très attentif à l'interprétation expressive des paroles, ainsi qu'à une vocalité libérée, presque libertaire. Quant à l'écriture, la spécificité italienne de Kittel se situe dans une italianité plus générale qui, bien sûr, est dans l'air du temps (derechef, l'exemple de Schütz). Mais l'intéressé sait faire entendre sa différence jusque dans des « standards » célèbres, largement utilisés avant lui (ainsi les formes à basse récurrente comme l'Aria di Ruggjero et surtout La Romanesca à deux sopranos, immortalisée dans son dolorisme par Monteverdi dans son 7e Livre de madrigaux).

 

La découverte de ce singulier talent séduit d'entrée, captive très vite. D'autant que le dossier est ici plaidé par l'une des plus habiles équipes de l'heure, ces orfèvres en matière de chant baroque et orné que sont Johanna Stojkovic et Bernarda Fink étant rejointes dans l'excellence par le trio des messieurs. Et par‑dessus tout, il y a le patron René Jacobs qui, sans négliger les devoirs qu'il doit à un instrumentarium superbement idiomatique, veille amoureusement sur le commerce des mots avec les notes, les affects, et rend sa vraie dimension à ce musicien poète qui joint des images d'une invention profuse à un rêve dont l'âme allemande n'a pas cessé d'être friande.

 

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