Texte paru dans: / Appeared in:
*  

Opéra Magazine # 87 (09/2013)
Pour s'abonner / Subscription information


Erato
9341332




Code-barres / Barcode: 5099993413329

Consultez toutes les évaluations recensées pour ce cd ~~~~ Reach all the evaluations located for this CD

Appréciation d'ensemble:
Analyste:  Cyril Mazin
 

Le chant de Farinelli


Ce n’est pas, loin de là, le premier disque entièrement consacré à la voix et au répertoire du plus légendaire des castrats. Mais Philippe Jarousski affronte ces airs de Nicola Porpora, le professeur de Farinelli, avec un tel charme et une telle aisance que l’on succombe.

Dans la vaste constellation des contre-ténors de notre époque, l’astre Philippe Jaroussky brille assurément avec une intensité toute particulière. Ductile, aérienne et d’une infinie subtilité, sa voix n’en finit pas de nous surprendre par son incroyable musicalité, son aplomb, mais aussi ses limites!

Si l’artiste poursuit, depuis plus de dix ans, une irrésistible ascension médiatique grâce à des enregistrements centrés sur des répertoires d’intérêt variable — tout oppose le sublime Duetti, en collaboration avec Max Emanuel Cencic et William Christie, à l’improbable Caldora in Vienna, sous la houlette d’Emmanuelle Haïm —, il n’en demeure pas moins que chacun de ses disques suscite un intérêt renouvelé. En témoigne ce nouveau programme, entièrement dévolu au célébrissime Farinelli (1705- 1782), prince des castrats s’il en fut. Articulé autour d’extraits d’opéras composés par Nicola Porpora ( 1686- 1768), son professeur, le florilège aligne pour la forme quelques airs connus, dont le superbe «Alto Giove» de Polifemo, ici merveilleusement murmuré, mais aussi sept pages inédites. Parmi ces dernières, il ne faut pas pour autant espérer découvrir de véritables trésors, tant la musique oscille, sans grande surprise, entre guirlandes virtuoses et plaintes suspendues. C’est, en revanche, du côté de l’interprétation qu’il faut réellement fixer son écoute. Car c’est avec un charme et une aisance sidérants que Philippe Jaroussky illumine ce répertoire, bien souvent retranscrit de manière factice par de nombreux chanteurs. Il faut ainsi entendre avec quelle fraîcheur il parvient à exalter l’élan rythmique de « Come nave in ria ternpesta », extrait de Semiramide regina dell’Assiria. De la même manière, le rutilant « Nell’attendere il mio bene », tiré de Polifemo, emporte tout sur son passage, la vocalise s’étirant toujours plus haut, plus loin, électrisante et jouissive !

Le caractère mélancolique de « Si pietoso il tuo labbro » (Semiramide riconosciuta) ouvre sur des perspectives en totale adéquation avec la sensibilité de l’interprète. L’infini velouté des notes tenues, le délicat frémissement du vibrato et l’ornementation exquise demeurent les qualités suprêmes du contre-ténor français. Tout au plus pourra-t-on déplorer un certain manque de consistance dans le registre grave (« Mira in cielo », extrait d’Arianna e Teseo). Mais, comme nous le savons, l’ancrage de la voix est ailleurs.

Invitée de marque et désormais complice régulière (Philippe Jaroussky apparaissait en tant que «special guest star» sur son album Mission), Cecilia Bartoli apporte une contribution notable et fiévreuse, le temps de deux duos souverainement fusionnels: « Placidetti zeffiretti » de Poliferno et « La gioia ch’io sento » de Mitridate.

Sous l’emprise instruite de son chef Andrea Marcon, leVenice Baroque Orchestra affiche ses plus beaux atours : cordes soyeuses, bois fruités et cuivres fringants rivalisent d’aisance. Probablement l’un des hommages les plus accomplis rendus à Farinelli au disque.

 

 

Fermer la fenêtre/Close window

 

Cliquez l'un ou l'autre bouton pour découvrir bien d'autres critiques de CD
 Click either button for many other reviews