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    On pense que tandis que Purcell créait Dido et Eneas, Blow 
    offrait avec cette Vénus et Adonis le fruit d'une longue recherche d'un 
    opéra anglais qui réponde à l'attente d'un roi francophile désireux d'émuler 
    Louis XIV. Vénus et Adonis, qui a presque autant de points de contact avec 
    Dido et Eneas qu'avec les opéras français de l'époque (en particulier ceux 
    de Charpentier), est le résultat de ce que nous appellerions aujourd'hui une 
    fusion : entre la pomposité française et la tradition anglaise des 
    mascarades, sans oublier l'influence évidente de l'opéra italien, en 
    particulier en ce qui concerne l'écriture vocale en solo, dans les arias et 
    ariosos. Vénus et Adonis est une oeuvre fortement expressive et parfois même 
    audacieuse, à propos de laquelle Charles Burney écrivit un siècle après sa 
    création que Blow agressait l'oreille avec ses dissonances illégitimes.
     Une écoute 
    attentive de l'oeuvre nous donne la clé de ces prétendues transgressions du 
    bon goût : il s'agit du risque que prend Blow pour traduire musicalement le 
    devenir dramatique, en ayant souvent recours à des domaines éloignés des 
    stéréotypes et des conventions de l'époque. Prudemment mais fermement, comme 
    Bach et Haendel avec les passages caractéristiques, d'une grande 
    expressivité, dans lesquels ils utilisent des dissonances et des 
    chromatismes surprenants (mais aussi brefs que ceux de Blow, et que 
    l'auditeur actuel peut assumer beaucoup mieux que sir Charles), Vénus et 
    Adonis tend vers une originalité intuitive. Jacobs, théâtral comme toujours, 
    et à la tête d'un effectif de luxe, aborde cette oeuvre magistrale en 
    soulignant l'effectisme dramatique qui lui est inhérent, mais aussi son 
    lyrisme exquis. Nous avons là une interprétation magnifique, qui est sans 
    aucun doute de tout premier choix, même si certains pourront considérer 
    qu'elle manque de nerf. Dans ce cas, une deuxième écoute saura convaincre de 
    la rigueur et de la validité de cette version. 
 JOSEP PASCUAL
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    It is believed that 
    while Purcell was composing Dido and Aeneas, Blow offered Venus and Adonis 
    as the fruit of a long search for an English opera that would satisfy a 
    Francophile king who wanted to emulate Louis XIV. It has almost as much in 
    common with Dido and Aeneas as it does with the French operas of the period 
    (particularly those of Charpentier). Venus and Adonis is the result of what 
    we would call a fusion between French pomp and the English tradition of 
    masque, not forgetting the clear influence of Italian opera, especially 
    concerning the solo vocal writing of arias and ariosi. Venus and Adonis is a 
    strongly expressive and at times audacious work. This led Charles Burney to 
    write a century after its debut that Blow attacked the ear due to its 
    illegitimate dissonances.  
    A careful listening to the work gives us the key to these supposed 
    transgressions of good taste. It concerns the risk that Blow takes to form a 
    shapely musical drama. It often reaches terrain distant from the stereotypes 
    and the conventions of the era. Prudent but firm like that of Bach and 
    Handel. It has their characteristic expressive passages in which dissonance 
    and surprising chromaticism are used. However, they are as short as those of 
    Blow and thus can be assimilated by the modern listener much better than by 
    Sir Charles. Venus and Adonis steps towards an intuitive originality. 
    Jacobs, theatrical as always, and producing some truly luxuriant effects, 
    approaches this masterly work by underlining its inherent dramatic effect 
    but also its exquisite lyricism. We have here a magnificent interpretation 
    that is, without doubt, a first class option, though some may consider that 
    it lacks verve. If that is the case, a second hearing will convince them of 
    the rigor and validity of Jacobs' intententions. 
    
 JOSEP PASCUAL
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