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Roger-Claude Travers De Luigi Ferro à Felix Ayo jadis, de Rachel Podger à Viktoria Mullova aujourd’hui, quelques élus ont jalonné la redécouverte de Vivaldi, des éveilleurs, entrouvrant la porte d’univers poétiques inconnus. Dmitry Sinkovsky rejoint le glorieux cortège avec un programme bien pensé, autour du Concerto fatto per il Sign Pisendel, taillé sur mesure par le Rosso, en I716-1717, pour le virtuose saxon. Un phénomène ! ce Pisendel, raffolant du jeu vigoureux sur plusieurs cordes, aussi porté sur les ornements alambiqués que sur les mélodies sentimentales. Bref, athlète et midinette. Shlomo Mintz s’y fourvoya. Sinkovsky émerveille. Ce monstre de technique naturellement voué au répertoire romantique, a croisé un jour le chemin de Marie Leonhardt. Et remporté haut la main deux concours prestigieux, le Bonporti et le Musica Antiqua de Bruges. Son Francesco Ruggeri de 1675 scintille de mille feux subtils. Un grand vivaldien se reconnaît dans les largos. Savourez celui du RV 242, métamorphosé par d’exquises diminutions, ou celui du RV 177 dont la grâce indicible conduit vers un ailleurs étrange. On ne s’étonne pas, en l’écoutant distiller un cantabile si subtil, d’apprendre qu’il est aussi chanteur. Un contre-ténor délicat, à en juger par quelques extraits disponibles sur YouTube (où l’on peut aussi prendre la mesure des moyens « modernes» et du souffle de Sinkovsky... dans la Sonate n° 3 d’Ysaÿe). Il sort les griffes dans les allegros sans jamais se raidir. Les figurations rapides bien articulées, les batteries d’arpèges endiablées, les jeux gutturaux sur plusieurs cordes ou l’extrême complexité des cadences du concerto d’exhibition RV 212a, ne sont qu’élégance et élévation. On pense souvent à Carmignola. Sinkovsky n’est pas moins noble et personnel. Un conseil : réservez le RV 177 (plages 1 à 3) pour la fin. La rusticité pataude de l’orchestre répondant à la ligne aristocratique de Sinkovsky déconcerte à la première écoute: simple contraste théâtral en fait, désiré par le chef Dmitry, qui sculpte dans le reste du récital la moindre nuance dynamique d’Il Pomo d’Oro. Un régal. |
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