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Diapason # 607 (11/2012)
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Decca
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Appréciation d'ensemble:
Analyste: Ivan A. Alexandre
 

Au soleil d’Alessandro

Premier opéra que Handel destina aux « rival queens » Cuzzoni et Faustina, Alessandro n’attendait donc, pour triompher, qu’un chef et... des voix!

 

Après avoir donné au King’s Theatre de Londres trois chefs-d’oeuvre consécutifs (Giulio Cesare, Tamerlano, Rodelinda, de janvier 1724 à février 1725 !), Handel cherche une idée. Ce sera une voix. Trois saisons durant, la Royal Academy of Music ne comptera donc plus une prima donna mais deux, que le compositeur devra servir à parts égales. Le premier des cinq titres ainsi élaborés est aussi le plus spectaculaire, les personnages y confondant jusqu’au délire la scène et la ville. Un castrat qui se croit le centre de l’univers (Senesino, premier Alessandro) nargue deux sopranos, celle qui vient de partager ses triomphes (Cuzzoni, hier Cleopatra, aujourd’hui la princesse scythe Lisaura) et la jeune recrue (Faustina, future Madame Hasse, ici la princesse persane Rossane) : où est le théâtre, où est la vie?

UNE FÉERIE VOCALE

Avant même de voir le spectacle (Athènes et Versailles au printemps prochain), il paraît évident que Max Emanuel Cencic, initiateur et vedette de l’opération, a saisi l’enjeu : métamorphoser une joute banale en féerie vocale. Louange du capitaine Cléon à Alexandre le Grand : « Fils de Jupiter, monarque surhumain, invincible, auguste, inaccessible, pieux, divin... » : peut-on mieux incarner le héros étincelant et fat que Max Emanuel Cencic ? Les doubles-croches (de « Risolvo aban donar » notamment) vous couperont le souffle, pas le sien. De ses deux conquêtes, Alexandre observe que « l’une est barbare, l’autre esclave ». Voilà comme une diva doit se tenir: enchaînée aux notes mais la rage au ventre. Ainsi font Karina Gauvin, assez sauvage pour les cabrioles de « No, più soffrir non voglio », assez fine pour la sicilienne « Che tirannia d’Amor », et Julia Lezhneva, oiseau de paradis ( « Alla sua gabbia d’oro ») d’une maîtrise stupéfiante dans la colorature comme dans le phrasé (« Brilla nell’alma »). Jusqu’au furtif Cleone, les comparses ne sont pas moins bien traités. Et comme, depuis le pasticcio Oreste, le jeune chef grec George Petrou occupe une place centrale dans la galaxie handélienne, notre coeur ne balance plus. Regretterons-nous ici ou là un rien d’affectation (« Vano amore »), quelques allegros cravachés à l’identique, un italien variable de menus accrocs dans le montage. Aucune importance. Malgré le charme du pionnier Kuijken (avec le trio Jacobs-Boulin-Poulenard, DHM 1984), malgré le récitatif théâtral de Michael Form (cf. page 94), non seulement ce coup de soleil qu’est Alessandro n’a jamais tant brûlé, mais l’opéra handélien espérait un tel hommage depuis... depuis trop longtemps.

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