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David Fiala La malice de Paul Van Nevel est sans limite, comme son amour de la musique qu’il défend depuis trente ans. En guise d’introduction à ce récital de cinq immenses motets tirés du plus fameux manuscrit de l’Angleterre Tudor, il nous avertit que, ces pièces longues et complexes dégageant une intensité émotionnelle « qui confine à la transe », il convient de ne pas en écouter plus d’une par jour. « Après tout, personne ne visite cinq cathédrales en une seule journée ! » La mise en garde n’est pas inutile, tant cette musique si particulière aux îles britanniques de la fin du XVe siècle est foisonnante (pour le dire positivement) voire épuisante (pour le dire un peu moins gentiment). Dans ces échafaudages polyphoniques aussi élancés que denses, allant de cinq à neuf voix, les mélismes les plus débridés déferlent sans ordre apparent sur les enchaînements harmoniques les plus tortueux. Van Nevel fait d’ailleurs bien de préciser que les « surprenantes modulations et dissonances sont interprétées exacte- ment comme elles sont notées » : on pourrait avoir des doutes (plage 1 à 11’ 50” puis 15’ 10” ou plage 3 à 8’). On serait même tenté de qualifier certains de ces passages de « n’importe quoi », et il n’est pas impossible, en effet, qu’ils résultent surtout des limites techniques de compositeurs demeurant après tout des figures mineures. Mais voila, Paul Van Nevel n’a cure de ce genre de considération et, après tout, les critiques d’art soulignent régulièrement combien les défauts techniques de certains peintres inspirés donnent de puissance expressive à leur oeuvre. Son engagement en faveur de ce répertoire s’inscrit en tout cas très logiquement dans le travail qu’il a toujours mené, évitant la plupart des grands noms canonisés par l’histoire de la musique pour mettre en avant les originaux et les sans-grade. Son choeur mixte à deux ou trois par voix est toujours aussi impeccable, et la main du maître toujours aussi sûre (malgré l’intonation et les phrasés perf du premier verset du Magnificat d’Horwood par les gosiers masculins). Avec trois inédits sur cinq pièces, ce disque ébouriffant « à consommer avec modération » complète parfaitement les cinq volumes des Sixteen sur l’Eton Choirbook, plus ceux des Tallis Scholars consacrés à Browne et Cornysh. |
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