Critique:
Elvire James
Ce cycle confondant de poésie et
d'approfondissement introspectif est d'autant plus exceptionnel qu'il a été
écrit par un jeune prodige de 22 ans! La juste maturité n'attend ni l'âge ni
la vieillesse: Purcell ne pouvait trouver meilleurs interprètes.
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Avant l'ère du Quatuor à cordes de l'âge
classique, la Fantaisie pour ensemble de cordes règne sans
partage depuis sa patrie d'excellence: l'Angleterre. Après les
fancies de Gibbons, Lawes, Jenkins ou surtout Locke, Purcell
l'a porté en son point de perfection comme ce disque en témoigne. Les
musiciens invités y dialoguent dans l'esprit d'une conversation des plus
intimes, révélant la part repliée de l'âme (Purcell comme Mozart affectionne
la tonalité de sol mineur!) entre mélancolie, aspiration, désir, nostalgie,
et avant l'heure, tendre spleen, labyrinthe de la pensée méditative et
lyrique... Autour de Jordi Savall, 6 instrumentistes parfaits dans
l'éloquence comme dans l'intériorité et aussi, cette qualité trop rare,
l'écoute et la fusion participative qui ici permet à la notion de dialogue
en résonance, de s'accomplir totalement.
L'album aborde
15 Fantaisies
d'après le
manuscrit du British Museum, un document demeuré inédit puisque Purcell ne
le fit jamais éditer: en 1680, date de l'achèvement de leur composition, le
genre était tombé dans l'oubli au profit de la Suite de danse et de la
Sonate... Pourtant ce que Savall et ses complices nous font entendre égale
dans la complexité et la profondeur de l'écriture, un monument musical comme
L'Offrance Musicale de Bach, plus tardive. Ce cycle confondant de
poésie et d'approfondissement introspectif est d'autant plus exceptionnel
qu'il a été écrit par un jeune prodige de 22 ans! La juste maturité n'attend
ni l'âge ni la vieillesse: Purcell ne pouvait trouver meilleurs interprètes.
Heureuse réédition.
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