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Analyste:
Denis Morrier Fille de l'architecte de cour des Este, devenue nonne à l'âge de quatorze ans au couvent de San Vito à Ferrare, Vittoria Aleotti publia à Venise en 1593 cette Ghirlanda de madrigali, son premier opus profane. Arrivé on ne sait comment en Thuringe, préservé des flammes lors de l'incendie de la Bibliothèque de Weimar en 2004, le recueil est emblématique de la musica moderna de la fin de la Renaissance.
Il trouve en Christoph Dittmar et son ensemble des interprètes scrupuleux autant qu'inspirés : ils ont choisi un diapason aigu, transposant convenablement les pièces notées en chiavette, à la quarte ou à la quinte inférieure, suivant les armures. Six chanteurs à la technique assurée se relayent pour former un quatuor apparié à chaque madrigal et en équilibrer idéalement les polyphonies. Le luth ou le clavecin apporte un soutien discret qui ne masque ni le contrepoint ni l'intelligibilité du texte.
La cité des Este était alors le haut lieu de l'avant-garde musicale, avec son emblématique Concerto delle dame, chapelle féminine privée de la duchesse Margherita Gonzaga constituée autour de Luzzasco Luzzaschi (dont certaines pièces forment ici un judicieux complément de programme). Sœur Raffaella est à la fois témoin et héritière de ce glorieux moment de l'histoire musicale italienne ; en témoignent les savants contrepoints forgés sur les vers fameux du Tasse ou de Guarini (autres gloires ferraraises).
Son T'amo mia vita, aussi harmonieux qu'éloquent, alterne fugues suaves et épisodes déclamatoires. Il ne démérite en rien face aux chefs-d'œuvre composés sur les mêmes vers (certes avec plus de hardiesse et d'invention) par Monteverdi et Gesualdo (lui-même époux d'une princesse ferraraise). La réalisation surclasse nettement les lectures de la Capella Clausura (CD américain confidentiel) et de la Capella Artemisia (Tactus).
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