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Analyste: Loïc Chahine Depuis Philippe Herreweghe en 1983 (Erato, avec Rachel Yakar), quatre Armide ont paru - Herreweghe encore (1992, HM), Ryan Brown (2007, Naxos), William Christie en vidéo (2008, Fra Musica) et Christophe Rousset (2015, Aparté) - sans qu'aucune s'impose comme une référence. La nouvelle gravure, parallèle aux représentations versaillaises d'un spectacle décevant, ne règle pas la question.
Vincent Dumestre anime un orchestre vif, coloré, nuancé. Il donne à l'ensemble une continuité dramatique qui sent le théâtre et séduit indéniablement - quelques exemples : le Menuet et la Gavotte du Prologue, la Ritournelle liminaire de l'acte I, ou le Prélude et l'accompagnement de « Plus j'observe ces lieux » au II (la polyphonie !). Les récitatifs bénéficient d'une effervescence qui en bannit l'ennui. Mais l'abus d'effets quelque peu ostentatoires dans le phrasé (l'Entrée dans le Prologue, la ritournelle avant « Venez, venez seconder mes désirs » au II), certaines instrumentations (violon solo et pizzicatos dans le premier menuet à la fin du Prologue, violes seules dans le Second Air au II, cordes pincées pour plusieurs danses du IV…) font lever le sourcil. A la fin, cette surinterprétation du discours instrumental agace par manque de classicisme (la suragitation de la Passacaille privée de noblesse).
Le Chœur de l'Opéra de Dijon s'approprie le style baroque français et affiche une discipline et une articulation parfaites. Mais ici encore, certains effets sont trop appuyés, tel ces « Chantons, chantons » (Prologue) où la virgule est systématiquement marquée au détriment de la ligne. Côté distribution, lauriers pour Eva Zaicik et Marie Perbost, Phénice et Sidonie de grand luxe, même si le texte se floute quelquefois chez la seconde dans les passages plus lyriques -mais quel phrasé ! Stéphanie d'Oustrac connaît le rôle-titre qu'elle incarnait déjà dans le spectacle de Robert Carsen en 2008. L'aura de la tragédienne fait mouche dès son entrée : l'incarnation du mot, les inflexions, l'autorité, la psychologie complexe du personnage, ses tourments, tout cela y est. Mais la voix accuse une certaine fatigue (dès « La chaîne de l'hymen m'étonne », au I), et diverses scories (souvent liées à l'engagement scénique) auraient mérité d'être corrigées par un vrai passage en studio.
Chez les messieurs, Cyril Auvity sait son Lully sur le bout des doigts. Il campe un Renaud éloquent et stylé, aussi héros qu'amoureux, malgré quelques accents tendus - révérence. Si Tomislav Lavoie manque un peu d'assise et d'ampleur pour Hidraot, Timothée Varon a la noirceur de la Haine, et presque trop de noblesse !
Bilan mitigé, donc. Cette nouvelle version est à connaître mais ne balaie ni Herreweghe/Yakar (longtemps introuvable et désormais disponible sur les plates-formes de streaming), ni Rousset (cf. no 657), ni la vidéo de Christie et Carsen (où d'Oustrac était plus en forme). Mettons à part la version remaniée en 1778 que Niquet a enregistrée (avec Gens, Alpha, c f. no 692) : qui nous offrira la référence pour le chef-d'œuvre de 1686 ?
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