Texte paru dans: / Appeared in:
Classica # 266 (10/2024)


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Château de Versailles  CVS 120 

Code barres / Barcode :
3760385430317


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Analyste: Phiippe Ramin
 

Les interprères chambristes prennent à bras-le-corps l'intégrale des pièces pour viole des père et fils Forqueray et en révèlent la profondeur immense.

 

Après les belles intégrales de Paolo Pandolfo (Glossa, t994), Lorenz Duftschmid (Pan Classics, 2004) ou Atsushi Sakai (Aparté, 201,5), Myriam Rignol et son équipe dressent un portrait complet des oeuvres du père Antoine et de son flls Jean-Baptiste. Ils invitent aussi à la fête le neveu Nicolas-Gilles pour quelques Airs sérieux et à boire transcrits pour la viole. Une grande partie du premier disque est consacrée à des pièces en marge des cinq suites pour viole auxquelles les chambristes réservent un traitement royal: beauté mélodique de l'allemande, sentimentalité légère de La Girouette, délice d'une Vénitienne exécutée au luth seul. Myriam Rignol prend à bras-le-corps les suites en proposant des passerelles entre les pièces du père et la version pour clavecin du flls, en développe la matière concertante; on commence La Laborde au luth, La Marella et La Portugaise au clavecin, La Clément propose même l'unisson mélodique du clavier et de la viole ! De manière générale, la viole ne prend pas en charge la totalité du discours et laisse le riche tapis harmonique et rythmique de ses partenaires prolonger l'intention. Elle peut ainsi se permettre un discours moins heurté, moins ostentatoire que dans les versions précitées. La musique gagne en ambition et les moments les plus graves (sarabande La D'Aubonne) une intériorité boulever-sante. Myriam Rignol et ses partenaires poursuivent en quelque sorte le travail de transcription de Jean-Baptiste vers la «pièce en concert» dont Le Carillon de Passy devient un exemple remarquable d'orchestration; on y croise fugitivement Fragonard et Couperin, Watteau et Rameau. Après une Bouron au caractère bien trempé La Régente déploie ses marches séduisantes avec noblesse, La Léon et La Silva creusent leur contrepoint à deux violes dans une ample respiration dont luth et jeu du même nom au clavecin recueillent amoureusement les confidences: c'est divin. Loin des sentiers battus, l'interprète évite les accents attendus dans la chaconne La Morangis préférant privilégier l'intensité harmonique et l'urgence du discours. La Jupiter trace un chemin sinueux, et là encore Myriam Rignol s'écarte des articulations standardisées et révèle une profondeur insoupçonnée à cette page spectaculaire.

 


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