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Analyste:
Jean-Philippe Grosperrin Avant de devenir après 1740 le grand auteur d'opéras italiens pour Frédéric II à Berlin, Carl Heinrich Graun débuta à la cour de Brunswick dès 1725, comme ténor d'abord puis comme compositeur de drames lyriques en allemand.
Ainsi de cette Iphigenia sur un livret de son mentor Schürmann, créée en 1728 et reprise en 1731. Encore loin des brillants du seria, plus proche de l'esthétique hambourgeoise ou de l'oratorio luthérien, Graun y montre une inspiration riche en finesses.
En dépit de sources multiples (d'où un Nestor tantôt ténor et tantôt basse), la partition nous est parvenue sans récitatifs et surtout sans les scènes chorales : adieu l'imposant dénouement avec sacrifice et théophanie de Diane. Reste une collection d'airs, vestiges d'une action où les protagonistes sont flanqués de Déidamie et du roi Thoas sous le pseudonyme galant d'Anaximène.
Ira Hochman et son ensemble, attachés à ressusciter les opéras de Schürmann, avaient déjà plaidé la cause du jeune Graun avec Polydorus (CPO, cf. no 697). Le résultat est plus probant ici, même si le soprano de Santa Karnite est toujours raide et inerte. La délicatesse des instruments, notamment pour la poésie d'Anaximène (bien servi par Terry Wey), est plus soignée qu'un sens théâtral des contrastes. Dominik Wörner, rompu à Bach, semble en peine d'assise et de tournure en Agamemnon, quand Andreas Heinemeyer convainc dans le caractère comique de Thersite. Clytemnestre, elle, ne fait que passer.
Place alors à Iphigénie et à Achille (créé par Graun en personne). Hanna Zumsande offre une flexibilité relative, mais assez de fermeté et d'intelligence pour soutenir des airs séduisants. La voix de Mirko Ludwig tire un peu parfois, mais le grain, la sensibilité et une conduite allégée s'imposent dans le superbe « Geliebte Seele » avec violoncelle obligé. Quand entendra-t-on l'autre Iphigénie de Graun, celle de 1748, emblème fastueux (d'après Racine, cette fois) du règne de Frédéric II ?
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