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Analyste:
Denis Morrier L'Escadron Volant de la Reine revient au caractère « ténébreux » de son premier disque (« Notturno », 2015). Articulé autour d'œuvres pour la semaine sainte, le nouveau programme, érige Scarlatti en véritable Monteverdi du XVIIIe siècle : un auteur maîtrisant stile antico et moderno, le contrepoint ancien hérité de la Renaissance comme la manière concertante et expressive de son temps.
Deux Répons des Ténèbres, pures polyphonies (cinq voix soutenues par l'orgue) emplies de dissonances, et un Miserere en ré mineur (à quatre voix) d'une densité quasi madrigalesque résument une première manière. Les deux autres Miserere en illustrent une seconde, celui en mi mineur étant un joyau étincelant de virtuosité mais aussi d'intériorité. Il revêt la forme d'une ample cantate, réservant aux cinq voix (en particulier aux sopranos) de brillants solos dont le caractère varie sans cesse au fil des versets (vibrant « Ne averte », poignant « Cormundum », alerte « Redde mihi »).
Une sonate du Vénitien Ziani vient ici s'ajouter à deux concertos du Napolitain, emblématiques de l'écriture moderne da chiesa. La finesse et les raffinements d'articulation, de nuances et d'expression dont les parent les musiciens de L'Escadron soulignent la subtile ductilité de leurs fugues comme le caractère des mouvements lents (propices à la méditation mystique) et rapides (avec des figures dansantes dans le Concerto n° 5).
Maïlys de Villoutreys et les cordes soyeuses de l'Escadron offrent une lecture à la fois scintillante et profonde de la Lectio secunda Feria in paras ceve (« Leçon du vendredi saint »), page exigeante et quasi cyclothymique, alternant agilité tempétueuse (« Plauserunt super te »), déclamation hiératique et expression pathétique (« Jerusalem convertere »). Une contribution majeure à la discographie d'Alessandro Scarlatti, trop peu représentative de l'immensité d'un génie qui pourtant passait dans toute l'Europe pour le musicien le plus accompli de son époque, selon Sébastien de Brossard.
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