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Analyste:
Jean Christophe Pucek Instrument domestique par excellence, le clavicorde semble tout indiqué pour le recueil à visée pédagogique que sont les Inventions et Sinfonies. Eta Harich-Schneider en 1950 puis, dix ans plus tard, Ralph Kirkpatrick, le choisissaient déjà pour leurs enregistrements, tous deux chez Archiv. On sait Andras Schiff curieux de claviers anciens, comme en témoignent deux albums Schubert au pianoforte. Le texte qu'il signe dans la notice révèle une longue fréquentation de Bach et du clavicorde, que confirme l'écoute. Nous voici invités à partager un moment d'intimité. La sonorité discrète de l'instrument, dont les capacités expressives (quel cantabile dans l'Invention no 13 !) sont exploitées avec art, emplit l'espace avec une présence étonnante, qu'il s'agisse de créer du pittoresque (Capriccio BWV 992) ou de susciter l'émotion (Sinfonia no 9 ). Les Inventions et Sinfonies dépassent ainsi leur statut d'exercice : le geste unificateur, mûri, de Schiff laisse le sentiment d'une narration continue où chaque pièce ajoute son caractère, sa couleur. Citons la noble ampleur de l'Invention no 6 et le demi-jour de la no 7, l'enchaînement des Sinfonies nos 9 et 10, légèreté insouciante puis incertitude inquiète. On retiendra également la réussite des Duos BWV 802-805 , dont la rigueur se voit tempérée tantôt par une conduite incisive (no 2), voire fiévreuse (no 4), tantôt par une élégance ( no 3 ) peu commune. Elle n'est pas moindre dans la Fantaisie chromatique, où l'on pouvait redouter qu'un instrument aussi peu spectaculaire n'émoussât la tension. Si l'impact sonore est moins immédiat, l'intensité ne pâlit pas face à celle imprimée, au clavecin, par Pierre Hantaï (Virgin, 1998). Les enregistrements d'Elisabeth Joyé (Alpha, 2003) et Bob Van Asperen (Aeolus, 2000, Diapason d'or ) dominent la discographie des Inventions et Sinfonie au clavecin, mais l'excellence discrète de Schiff s'impose aujourd'hui à leur côté.
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