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Analyste: Jean-Christophe Pucek Transposer au violon les Suites pour violoncelle de Bach n'est pas un geste récent. Au XIXe siècle, Ferdinand David, Konzertmeister du Gewandhaus de Leipzig, s'y était déjà aventuré. Giuliano Carmignola joue, lui, la version de Marco Serino, offrant un prolongement à sa gravure des Sonates et Partitas (DG, 2018). Comparer la nouvelle version avec celle de Rachel Podger (Diapason d'or, cf. no 682), qui interprète sa propre transcription, se révèle hasardeux tant l'esthétique diffère. L'Italien, s'il a su étudier pour assimiler des principes d'exécution « historiquement informée », n'est pas d'obédience baroque ; à l'instar d'Anner Bylsma dans sa seconde gravure des Suites (Vivarte, 1992), l'instrument qu'il joue est à la lisière entre ancien et modernisé.
Le rapport au temps qu'il instaure est autre, la respiration plus ample : les préludes délaissent le démonstratif pour l'esprit du ricercare ; celui de la BWV 1011 illustre ce caractère exploratoire avec une acuité qu'augmente encore l'usage de la scordatura. Une émotion nourrie par le chant illumine les allemandes (celle de la BWV 1012 est une oraison bouleversante) et les sarabandes (funambule sur un souffle dans la BWV 1009 ). Pour autant, l'énergie n'apparaît jamais bridée (Courante de la BWV 1008, comme une flèche décochée), la recherche de densité sonore n'alourdit en rien les appuis (Menuets de la BWV 1007, d'une grande légèreté de touche).
La somme frappe par son extrême cohérence de ton, d'idées : mouvements et Suites sont investis, explorés jusqu'aux confins de leurs possibilités expressives. Carmignola trace une voie personnelle nourrie par l'expérience, réussit une synthèse harmonieuse entre tradition et historicité. Sa proposition a le seul tort d'arriver après celle de Podger ; elles sont deux chemins de crête sur un même sommet. |
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