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Diapason # 715 (10/2022)
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Harmonia Mundi
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Analyste: Loïc Chahine

Au sommet de l'édifice trône l'intégrale des Sonates et partitas pour violon seul dont les deux volumes parus séparément étaient récompensés dans nos colonnes - les BWV 1004 à 1006 glanaient même un Diapason d'or de l'année 2010. D'un raffinement constant, le parcours unit la force d'une technique moderne (le Stradivarius « La Belle au bois dormant » de 1704 joué par la musicienne est ici monté de cordes en métal) et les connaissances acquises par le mouvement « historiquement informé ». Partout y souffle l'esprit dans une pureté, une nudité presque ascétiques - l'économie du vibrato n'y est pas pour rien, qui expose d'ailleurs une intonation immaculée. Must absolu.

Pour le reste du voyage, la violoniste troque son Strad' pour un Jacobus Stainer - luthier très estimé de Bach lui-même - de 1658 monté de cordes en boyau. Dans les BWV 1014-1019, l'équilibre se réalise comme naturellement avec le beau clavecin d'après Gräbner joué par Kristian Bezuidenhout. Une version volontiers hédoniste, aux couleurs soignées, peut-être un rien distante.

Côté chambriste, l'aventure s'arrête ici -manquent donc les pièces avec basse continue (BWV 1021-1026 ) ainsi que les sonates en trio - rêvons tout de même à celle de L'Offrande musicale !

Côté concertos, tuttissimo : aux canoniques BWV 1041 et 1042, Faust et ses comparses ajoutent, comme de juste, le double BWV 1043, le violon-hautbois BWV 1060R, la reconstitution d’un état premier putatif du BWV 1052 – qu’on adhère ou non à l’hypothèse, le résultat est grisant, la maîtrise sans borne et sans tapage de la violoniste éblouissent. S’y ajoute un autre état premier hypothétique : celui de la célèbre Suite en si mineur abaissée d’un ton et dont la partie soliste passe de la flûte au violon.

Orchestral ou chambriste ?

L'ensemble y gagne un moelleux, un dialogue à mi- chemin entre le chambriste et l'orchestral, et quand la Badinerie pétille tant (quels accents !), on ne fait guère la fine bouche.

Parmi les six Concerts brandebourgeois d'« Akamus » deuxième gravure, les plus réussis sont justement ceux où s'invite Faust : « un no 3 effervescent, solaire, avec des dialogues qui circulent entre les pupitres comme des bourrasques, un no 4 pimpant et délicat» (Jean-Christophe Pucek, cf. no 704 ).

Si, pour quelques pages, on peut trouver plus gratifiant ailleurs - certains concertos gagneraient à davantage de panache -, l'ensemble s'impose comme un tout : celui d'un répertoire rarement réuni d'un seul bloc, celui d'un parcours d'artiste exemplaire par sa pudeur et sa sagesse. Vertus cardinales chez Bach.

 



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