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Analyste: Jean-Philippe Grosperrin Émule de Noverre, le chorégraphe Angiolini militait pour fonder sur la seule danse la représentation d'une action scénique qui développerait un sujet « terrible », digne de la tragédie. D'où ces deux expériences viennoises en collaboration avec Gluck et son librettiste Calza-bigi, Don Juan (1761) et Sémiramis (1765). Préludant à Orfeo (1763) et Alceste (1767), ces ballets contribuèrent à forger un langage nouveau, à la fois scénique et musical, où la condensation expressive est déterminante. Sémiramis fournira plus tard à Gluck la substance d' Iphigénie en Tauride , et la Danse des Furies qui clôt Don Juan fut un emblème Sturm und Drang des temps nouveaux. Après le Don Juan révélé par Gardiner (1981, Erato) et le même couplage par Bruno Weil (1992, Sony), Jordi Savall privilégie un grain âpre, des couleurs assez crues (cors très en dehors), mais l'orchestre sonne plus terne que brillant, non sans éparpillement. Face à la manière très graphique de Gardiner, dont la subtilité, l'élégance, le sens de l'étrangeté ne s'affirment jamais aux dépens de la ligne ni de la pulsation, les choix de Savall paraissent machinaux, gesticulants, moins chorégraphiques en somme. Maint détail atmosphérique du Don Juan se trouve gommé : pédale inquiétante aux altos (no 2), trémolo aux cordes (nos 5 et 24), micro-contrastes dynamiques, tenues ascendantes des violons dans le fandango (ici doté de castagnettes). Le nerf de la danse, le tranchant de Gluck se dérobent, gênés par le babil ajouté d'une guitare ou d'un chitarrone qui parasite la netteté capitale des structures. Dans les dernières scènes, Savall accentue le relief comique mais néglige la terribilità, jusqu'à un enfer édulcoré (ostinato, clameur des cuivres) donc raté, loin de la rigueur implacable et visionnaire de Giovanni Antonini dans ses extraits de Don Juan (« La Passione », Alpha). La guitare persiste pour Sémiramis , mais c'est un clavecin invasif qui ruine l'onirisme des scènes du spectre. On trouvera de toute plus façon plus de fini orchestral et de phrasés suggestifs dans la version de Bruno Weil et Tafelmusik, qui reste prioritaire. |
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