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Diapason # 712 (06/2022)
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Analyste: Vincent Genvrin

Correa de Arauxo est depuis toujours un fidèle « compagnon de route » de Bernard Foccroulle. Reprenant le fil d'une discographie amorcée il y a trente ans, et après bien des expériences au concert, ce dernier a cette fois voulu faire les choses en grand.

L'une de ses méthodes favorites pour faire découvrir le répertoire de l'orgue, réputé vivre en autosuffisance dans une sorte de banlieue de la « grande musique », consiste à l'associer à des pages vocales ou instrumentales du même auteur. Correa n'a hélas écrit que pour son instrument. D'où l'idée excellente d'exploiter les pièces que le Sévillan cite en tant que modèles dans la volumineuse préface de son Libro. Le plus intéressant est que celles-ci proviennent en grande partie de l'école franco-flamande du siècle précédent : le préjugé selon lequel, « avant le XIXe, on ne jouait que de la musique contemporaine » prend à nouveau un petit coup dans l'aile.

La fluidité est parfaite entre ces œuvres si diverses, la vocalité idéale de l'ensemble InAlto, les sonorités coruscantes des tuyaux, elles-mêmes prolongées par les cornets, trombones et dulcianes des ministriles, sortes de confréries d'instrumentistes à vent alors très actives. Parmi les orgues, tous admirables, on remarque celui de Castano del Robledo dont la tuyauterie du XVIe siècle contient un rarissime Lleno avec tierce, jeu que demande Correa pour ses tientos de dessus : la continuité avec la culture flamande se manifeste aussi en ce domaine. Formule séduisante, le cornet de Lambert Colson prend en charge une partie dans les tientos à deux dessus, mettant toutefois de côté les astuces déployées par l'auteur pour combiner, sur un clavier réduit, deux solos d'une incroyable indépendance et trois voix d'accompagnement…

Par un jeu de miroirs, la connivence de Correa avec les maîtres de la Renaissance reflète celle qui relie aujourd'hui l'auteur d'Evidi quattro stelle à l'imaginatif et savant Espagnol. Avec une intelligence qui n'étouffe jamais l'émerveillement, Foccroulle nous guide à pas sûrs à travers un fabuleux royaume de dissonances, d'effets rythmiques, de lyrisme intérieur ou exacerbé.



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