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Analyste: Philippe Ramin HUIT TRÈS GRANDES SUITES
L’ltalien Francesco Corti investit le clavecin de Haendel d'une majesté inconnue et d'une virtuosité enivrante. Pour servir I'esprit et la lettre il n'hésite pas à prendre des risques. Depuis l'intégrale de Scott Ross (Erato,1984) dont le rayonnement opère toujours, les huit grandes suites de Haendel n'ont guère tenté les plus brillants représentants de l'école anglaise Trevor Pinnock et Christopher Hogwood (seuls quelques extraits émaillent leur discographie), laissant donc à l'Europe le soin de dresser le portrait du Saxon naturalisé britannique en 1726. Le corpus ne laisse pas toujours transparaître les desseins du compositeur et concède ainsi au claveciniste une grande liberté pour convaincre et autorise un certain nombre de choix stylistiques. En marge de cet ensemble, Francesco Corti propose plusieurs transcriptions d'ouvertures d'opéra, de la plus connue (Rinaldo) par William Babell (c. 1690-1723) jusqu'à d'habiles réalisations anonymes du XVIIIème siècle (Il pastor fido, Rodelinda, Radamisto, Teseo). TRANSCENDANT S'inspirant de la pensée ornementale de Geminiani, de Babell et de l'édition revue par Gottlieb Muffat, Corti s'est efforcé de retrouver l'esprit et la lettre de ces compositions, là où la plupart des enregistrements disponibles ne procèdent qu'à des emprunts mesurés à la manière française et italienne. Transcendée par la technique et le talent de l'artiste, cette proposition esthétique éblouissante nous plonge dans le processus créatif du compositeur, fait table rase de nombreux clichés interprétatifs encombrés d'ornements hors sujet et apporte des solutions brillantes à une notation rythmique parfois aléatoire (thème fugué de l'Allegro en ré mineur, HWV 428). UNE DÉLICATESSE INFINIE Le clavecin d'Andrea Restelli (Milan, 1998) d'après Christian Vater (Hanovre, 1738), superbement enregistré par Ken Yoshida soutient idéalement le projet de Francesco Corti. Les deux huit pieds possèdent une délicatesse infinie et le plein jeu ne manque pas de personnalité ni de profondeur. Ici, les allemandes peuvent redevenir nobles et âpres comme chez Froberger, les gigues s'élancer, légères ou passionnées, et la virtuosité se doit d'être non seulement brillante mais aussi spectaculaire : un étincelant feu d'artifice pour le Presto en ré, un Allegro en fa aux reprises vertigineuses fera fuir les tenants du texte pur,leur élan semble pourtant en parfait accord avec la flamboyante nature d'un compositeur pétrie de sève improvisatrice. Capable d'une belle introspection, le claveciniste soutient un chant délicat dans les adagios, dans un « Lascia ch'io pianga » de Rinaldo intense et dans ce Prélude en mi, HWV 430 mélancolique et errant. En redistribuant les cartes des cartes des caractères et en saturant son discours de couleurs inédites, l'artiste a pris des risques. On le remercie d'avoir osé enlever un épais vernis à ces suites enfin grandes.
PRISE DE DON DU MOIS - CLASSICA # 243
Le livret ne précise pas dans quelle salle de la Villa San Fermo, ancien cloître transformé au XIXième siècle, à Lonigo, entre Vicence et Vérone, fut installé le clavecin. À en croire la prise de son de Ken Yoshida, elle doit être spacieuse puisqu'elle accompagne la riche sonorité de cette copie de Christian Vater d'une réverbération justement dosée. Justement car elle laisse le son se déployer dans l'espace, installe une scène pour le jeu si joyeusement théâtral de Francesco Corti et invite l'auditeur à participer à la représentation de cet opéra sans paroles. Justement parce qu'elle empêche le brouillard acoustique de s'emparer de I'instrument et de masquer les nuances et les phrasés d'un grand artiste. L'ivresse dans un flacon de très belle facture : le luxe I
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