Après
plus de quarante ans de carrière, Dominique Visse parvient encore à nous
surprendre. Voici qu'il s'aventure dans des cantates du baroque naissant, dont
certaines figuraient déjà au programme de ses « Parole e querele d'amor »
partagées avec Agnès Mellon (Zig-Zag Territoires, 2009). Bravo aussi au
cornettiste Jean-Pierre Canihac, au tromboniste Daniel Lasalle et à la
violoniste Hélène Médous. Soutenus par un continuo à la précision inattaquable,
ces trois virtuoses rivalisent en passaggi et ornements dans les
redoutables sonates et canzones concertantes de Cesare et Castello. Le
contre-ténor s'empare avec une poignante intensité dramatique du lamento de
Sances Usurpator tiranno, aux dissonances et chromatismes sensationnels.
La chaconne Accenti queruli du même Sances, abordée avec une
distanciation qui donne sens à un certain manque de souplesse, devient un
monument d'ironie narquoise, quand Su la cetra amorosa de Merula se pare
d'atours suaves et spirituels, jusque dans son évocation de la guerra amorosa.
De l'Eraclito
amoros o de Barbara Strozzi - qui revenait à Agnès Mellon en 2009 -, le
contre-ténor livre une interprétation confondante de profondeur tragique, tout
en déchirements et fulgurances, en contrastes de couleurs et de nuances, avec
une attention toute particulière au texte, jusque dans sa conclusion désolée.
Instrumentistes et chanteur impriment en retour au célèbre Se l'aura spira de
Frescobaldi une fraîcheur, une variété de couleurs et d' affetti inusuelles.
Des vétérans au sommet !
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