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Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste: Philippe Venturini CORPS ET ÂME Celui du Christ est ici célébré dans la plénitude et la retenue. Daucé réussit un habile mélange. Et de trois! Harmonia Mundi inscrit en effet à son catalogue une nouvelle version de la cantate Membra Jesu nostri après celles de René Jacobs en 1990 et de Cantus Cölln en 2005. Comparé à ses prédécesseurs et au Ricercar Consort (Mirare, 2018), Sébastien Daucé se distingue par un riche continuo et un effectif choral de deux chanteurs par voix, et non un soliste, pour les sections introductives et conclusives de chacune des sept parties. Ce jeu d'opposition entre les effectifs participe d'une logique interprétative qui joue des contrastes avec autant de délicatesse que de pertinence: de fines gradations dynamiques et variations de tempo éclairent ainsi le relief d'une musique peu propice aux envolées lyriques, plu soumise au débit de la parole qu’aux impératifs de la séduction vocale. ÉPANOUISSEMENT SONORE Cette célébration des membres du Christ sur la croix laisse un faible espace de liberté aux musiciens car il faut, en cette Allemagne du Nord, résister aux charmes vénéneux de l'opéra. Sébastien Daucé et l'Ensemble Correspondances parviennent pourtant à auréoler un discours d'une clarté et d'une intelligibilité exemplaires d'une beauté musicale saisissante: la somptuosité vocale (solistes exceptionnels, malheureusement non identifiés dans le livret), la plénitude sonore (cordes aux reflets ambrés), les frottements de seconde au début de Ad manus, le bousculement de la plainte de « Vulnerasti cor meum » dans la sensualité de « soror mea, sponsa » dans Ad cor. Aucune version n'avait jusqu'alors réussi à restituer aussi subtilement l’ambiguïté de cette musique, qui oscille entre douceur et douleur, se confie sans s'épancher, s'étourdit de dolorisme: l'énigmatique volupté de Sainte Thérèse du Bernin sous les sombres habits de Luther. Cette même « obscure clarté » se répand sur les autres titres de ce remarquable programme de déploration dont la gravité et la solennité ne figent jamais l'éloquence. Cela méritait bien un troisième enregistrement.
AIban
Moraud et Alexandra Evrard n'ont pas probablement eu à recourir à un quelconque
artifice électronique pour ,obtenir une sonorité aussi onctueuse. L'Ensemble
Correspondances, par l'exceptionnelle homogénéité de ses pupitres et de ses
timbres, s’en charge. Et l'abbaye aux Dames, à Saintes, leur prête une
acoustique que l'on sait généreuse et enveloppante. Mais il faut savoir en
cerner le caractère et en baliser l'espace pour ne pas disparaître dans le
brouillard de la réverbération. L’emplacement des micros a donc été
judicieusement choisi afin de conserver la lisibilité polyphonique manifestement
recherchée sans réduire la palette des couleurs ni la variété des matières (le
grain d'une voix soliste, la discrète ponctuation du théorbe). La clarté de
l'expression profite alors de textures voluptueuses: l'interprétation et la
prise de son suivent ainsi la même direction. |
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