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Appréciation d'ensemble: |
Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste:
Jean-Christophe Pucek Face à lui-même. Gunar Letzbor se confronte pour la seconde fois à ce monument de la littérature baroque pour violon que sont les kaléidoscopiques Sonates du Rosaire. Enregistrée en 1996 pour Arcana (cf. nº 440), sa première version avait, par son insolente virtuosité et son continuo chatoyant, donné quelques cheveux blancs à celle, alors déjà quasi mythique, de Reinhard Goebel (Archiv, 1991). Le temps a passé sur cette réussite ; d'autres archets fameux sont venus tenter à leur tour de lever un pan du voile de mystère qui entoure ces seize sonates hérissées des difficultés induites par l'usage diabolique de la scordatura, cette modification de l'accord habituel de l'instrument. Le regard de Letzbor sur l'oeuvre a évolué de façon si sensible qu'un nouvel enregistrement se justifiait. Moins extérieur sans rien abdiquer de son panache, son propos a gagné en profondeur, en densité, se délestant des effets faciles et des fioritures pour se concentrer sur les affects et les images suscités par Biber: Jésus au Temple (Sonate V) est un triomphe tranquille, les chromatismes de la Flagellation (Sonate VII) lacèrent l'oreille, une aurore miraculeuse se lève sur la Résurrection (Sonate XI), L'Assomption (Sonate XIV) chante la tendre apothéose de la joie. Cette exigence de sobriété se matérialise aussi par un continuo minimal dont a été banni tout ce qui pouvait détourner l'attention ; orgue et violone renforcent l'atmosphère de recueillement que viennent scander ou alléger avec parcimonie les ponctuations du théorbe. Le parti pris de pondération, voire de lenteur narrative, pourra dérouter; la Passacaille finale, trouée de silences, étirée jusqu'à frôler la dislocation, n'en conserve pas moins son pouvoir hypnotique et ascensionnel. Cette lecture éperdue d'affection, sans concession aux modes, s'impose comme une méditation, un acte de foi dans la musique; elle ose, le pari pascalien sur ce qui, « sensible au coeur », en transcende les notes.
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